 Il aura transporté le Ring de Bayreuth à Paris, mais ce 1er Septembre 1955, Hans Knappertsbusch revient chez lui, à Munich, au Prinzregententheater qui servait alors d’opéra. La mise en scène classique, mais qui ne manquait pas d’arrière-plans psychologiques, d’Heinz Arnold était une sorte d’idéal, resituant l’action des Nibelungen dans son temps mythique, Knappertsbusch affutant sa direction, la faisant plus vive, et, s’il se peut pour lui, dans les propres termes de son temps musical si vaste, plus cursive qu’à Bayreuth. Distribution en or pur :Aldenhoff était le Siegfried d’alors, la voix n’a rien perdu de sa vaillance depuis son Ring pour Keilberth à Bayreuth, timbre insolent, mots mordant, ce Siegfried sombre, débarrassé de toute naïveté, qui va vers le sombre de son destin les yeux grands ouverts est simplement inouï, comme la Brünnhilde insolente, en son pur âge d’or de Birgit Nilsson. Vénéneux, de timbre, de chant noir, Hermann Uhde sera pour quelques éternités encore le Gunther absolu, surtout face au Hagen de Gottlob Frick, monstre froid. Admirable de fausse fragilité, Leonie Rysanek est émouvante : il faut l’entendre s’interroger. « War das sein Horn ? », bref, inquiet, annonce un peu Elektra. L’Immolation de Brünnhilde pourra suivre, Nilsson s’y souvenant plus qu’en aucune autre de ses interprétations du timbre de grande clarinette de Flagstad. Ce feu dans le timbre, cet aigu sombre et décidé, les a-t-elle jamais aussi intense, et avant le bucher aura-t-il autant, portée par cet art du récit qui signait tous les Ring de Knappertsbusch ? Soirée historique, magnifiquement éditée par Orfeo. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)

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