 En poste à l’Orchestre de la RAI de Milan à partir de 1974 (date de son départ d’URSS), le chef russe Vladimir Delman laissa à la postérité plusieurs gravures dont cette version prise sur le vif de la Symphonie n° 9 de Mahler. Il s’agit d’un repiquage d’archives qui est très instructif quant à l’engagement d’un orchestre peu habitué à cette musique. Le charisme du chef est remarquable et il faut passer outre les toux du public, le souffle et les saturations dans les fortes pour découvrir l’unique version gravée par l’orchestre de la RAI de Milan de cette partition (contrairement à la RAI de Turin qui bénéficia des captations de Barbirolli et de Maderna). Il est vrai que les orchestres de la RAI étaient, à l’époque, condamnés à disparaître à l’exception de celui de Turin. Bien que le niveau technique soit inférieur à celui des grandes phalanges internationales, les musiciens sont poussés dans leurs derniers retranchements. Ils offrent une lecture d’une noirceur et d’une violence rares. Les répétitions en nombre demandées par Delman offrent une souplesse de lecture tout à fait remarquable. Toute la dimension chambriste de la symphonie notamment à la fin du premier mouvement apparaît avec une clarté et une finesse rares. Espérons qu’Urania poursuive son exploration des archives mahlériennes (et pas uniquement) de Vladimir Delman, un chef qui, hélas, ne connut pas une carrière internationale. (Jean Dandrésy)  Qui se souvient encore de Vladimir Delman ? Les mélomanes italiens, et tout particulièrement les abonnés de la RAI Milan où ce chef russe de naissance, israélite de confession, officia à compter de 1974. Un peu moins d’une année avant sa mort, le RAI diffusa une interprétation fabuleuse de la 9e Symphonie de Gustav Mahler, compositeur qui fut l’un des sujets de son art. La voici enfin éditée, expressionniste, d’une puissance tellurique, proche par la violence sans frein, l’amertume, du geste d’un Otto Klemperer. L’orchestre est parfois près de rompre, mais Delman ne cède jamais, entraine la phalange milanaise dans un conte gothique. Fascinant, et pour le public italien, comme un rappel des sortilèges sonores qu’y instillait jadis Bruno Maderna. Urania a eu mille fois raison de divulguer cette archive considérable, qu’elle ne s’arrête pas en si bon chemin, la 3e Symphonie de Bologne (avec une étonnante Viorica Cortez, la RAI Milan conserve également deux autres éxécution), de Milan toujours la Résurrection de la avec Anna Pusar, la Titan, la 5e Symphonie, Das Lied von der Erde mériteraient une publication, et si l’éditeur retrouvait l’écho sonore de la Huitième à Bologne, de la 4e donnée une fois avec l’Orchestre Verdi qui fascina tant le jeune Riccardo Chailly... (Dicophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)  In this Mahler’s Ninth, traversed from the outset by the cardiac extrasystole which was about to lead its composer to his death shortly afterwards, this very Russian, Dostoevskian liturgy of darkness emerges with a clarity that hurts. Delman is the survivor of the death of an entire epoch: his logographer, glossator, in the hermitage of his own soul. Everything in this Ninth is driven to the breaking point; the orchestra gasps for breath. Yet, in the end, one feels that there is no other way to experience music.
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