 Carl Philipp Emanuel (1714-1788) était le fils musicien préféré de Jean Sebastien Bach, et pensait avoir reçu du destin le devoir de porter la musique de son temps jusqu’à une esthétique nouvelle : celle du style de sentiment (plutôt que sentimental) qui imprègne la majeure partie de son œuvre, notamment celle pour clavier que plusieurs pianistes contemporains — Mikhaïl Pletnev, Ana-Marija Markovina, Marc-André Hamelin, François Chaplin, Danny Driver — ont avec succès sortie de l’oubli. Les 3 sonates pour viole de gambe, ici accompagnées au clavecin, ne dérogent aucunement à cette esthétique reposant sur l’expression d’une sensibilité aiguisée toutefois contenue dans les formes qui assurent la transition du baroque au classicisme, et qui permettent de voir au loin se profiler, Mozart, Haydn voire Beethoven. L’auditeur notera à cet effet l’emploi fréquent d’appogiatures, de pauses répétées, de quelques dissonances destinées, par exemple dans l’Adagio ma non tanto de la Sonate en sol majeur Wq 137, à faire frémir et tressailler un discours revisité sur lequel plane encore par moments l’ombre du père. Les recherches musicologiques sur les tempi à adopter ainsi que l’engagement intense de l’archet mordant et des cordes acescentes de Luca Lazzarini, encore souligné, il est vrai, par une prise de son qui l’avantage en le captant au plus près et relègue malheureusement à l’arrière plan le clavecin intelligent de Nicola Reniero, contribuent à rendre puissamment le spectre des émotions retracées par le compositeur. (Jacques-Philippe Saint-Gerand)  The music of C.P.E. Bach showed the way to other great musicians who came after him and links baroque to classicism. He wrote the three Sonatas for viola da gamba and harpsichord during his period in Berlin, when he was working at the court of Frederick the Great. In those years the use of the viola da gamba was becoming increasingly less common in many countries, leading several contemporary sources to allow the viola da braccio in the performance of these works. These three compositions follow a pattern which lies between the baroque sonata and the classical one. The sonata form is not yet defi ned but notably the main movement (the fi rst in Wq 88, the second in the other two) is indeed divided into two parts but the second one is longer. The choice of tempo has to be analysed separately. Also J.J. Quantz was in the service of Frederick II and it was precisely Quantz, in his momentous treatise Versuch einer Answeisung die Flöte traversiere zu spielen (On Playing the Flute) who gave valuable indications on the speed of performance that we have tried to adopt and follow. These indications are extremely useful and, just because they come from a leading author and are truly inserted in the musical scene of the time, they are to be considered precious, reliable testimonies that can guide in the choice of metronomic tempos.

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