Une déception (relative) : Arabella Steinbacher a beau soigner son jeu d’archet, élégante, sensible dans l’Andante, essayant d’extirper l’œuvre de l’orbe soviétique pour en exalter avec tendresse les saveurs arméniennes – à ce titre le cœur suspendu du final est assez merveilleux, dolce nostalgique – il lui manque simplement le métal, la puissance vorace, l’exultation solaire que David Oistrakh, Julian Sitkovetsky, et parmi les non russes Gerhard Taschner, y iront mise. L’accompagnement discret de Sakari Oramo ne l’engage pas d’ailleurs à outrepasser son jeu d’abord lyrique. L’album penche donc du coté violoncelle. Son chef d’œuvre ? Oui, plus même que ses ballets, d’ailleurs les autorités ne s’y trompèrent pas, dénonçant la « dérive » à laquelle Khatchatourian semblait s’être livré, entrainé par les sortilèges de la « grande caisse ». Jdanov avait vu juste, la Grande Guerre Patriotique avait décillé le regard du compositeur arménien qui écrit ici un Requiem sans mot, avouant que les thèmes si étreignant de cette rapsodie en trois mouvement avaient coulé à flot. L’œuvre est restée bien moins courue que le Concerto pour violon, et les versions soviétiques, rares (Sviatoslav Knushevitsky, Natalia Shakhoskaya, Marina Tarasova, Rostropovitch l’ayant dédaignée tout comme Daniil Shafran), semblent toutes contraintes, même celle dirigée par le compositeur avec la magnifique Natalia Shakhovskaya. L’éclairage rasant que Daniel Müller-Schott distille dans les premières mesures spectrales de l’Andante, l’appassionato de son archet qui serre les cordes dans la sublime déploration du finale, l’orchestre de cendre et de miel composé par Sakari Oramo délivrent enfin une version qui rend justice à ce que je crois bien être le plus beau concerto pour violoncelle né en URSS au XXe Siècle, devant les opus de Chostakovitch ou ceux de Prokofiev. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)
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