Le label Biddulph, spécialisé dans la préservation des legs des violonistes du passé, les plus connus tout comme les oubliés, propose ici le live du récital qu’Oscar Shumsky, accompagné de Robin Sutherland, donna à Berkeley le 25 janvier 1980. Shumsky était né américain à Philadelphie, en 1917, dans une famille d’origine russe, et commença les études de violon à l’âge de trois ans. Contemporain de Menuhin, Ricci, Milstein, il fit d’abord une carrière de chambriste et de musicien d’orchestre car il répugnait aux strass et paillettes qui entouraient déjà le renom des grands solistes. Son jeu, à la fois intense, communicatif et raffiné, associait la grande tradition romantique des violonistes juifs russes à l’éloquence qui caractérisait le jeu de son idole, Fritz Kreisler. Doté d’une maîtrise technique immaculée, Shumsky possédait également un jeu lyrique chaleureux soutenu par une intonation à l’expressivité remarquable. Mais toutes ces qualités étaient retenues par la pudeur et les exigences musicales d’un être intègre qui ne souhaita jamais connaître la notoriété des Heifetz, Kogan, Francescati, Rabin, Oistrakh ou Perlman. Ce n’est qu’après une intégrale des Sonates de Mozart avec Arthur Balsam (Musical Heritage Society MHS 3475-80), et une absence sur scène de plus de 45 années, que Shumsky consentit à rejouer en public, et à graver des œuvres de Bach, Beethoven, Brahms, Grieg, Dohnanyi and Leo Weiner. La Sonate en Mi mineur BWV 1023 de Bach dans l’arrangement de Siloti (1863-1945), comme la Sonate « à Kreutzer » de Beethoven, attestent la hauteur de vue d’un violoniste préférant l’intériorité et la musicalité aux démonstrations d’exubérance. La Sonate pour violon seul op. 115 de Prokofiev, une œuvre qu’il n’enregistra jamais commercialement, permet à Shumsky de témoigner, dans les tremolandos du premier mouvement, de la flexibilité de son archet. Difficile ensuite d’imaginer une Sonate de Tartini plus intensément diabolique dans l’enchaînement de ses trilles. Deux bis s’ajoutent à ces réussites, la seconde Romance op. 50 de Beethoven, et surtout le très virtuose arrangement par Kreisler du Rondo en Sol de la « Sérénade Haffner » de Mozart. Shumsky avait déjà enregistré en 1979 l’op. 47 de Beethoven avec Earl Wild (Ivory Classics CD-73003), mais ici l’accompagnement de Robin Sutherland (1951-2020), parfaitement réactif aux moindres inflexions du violoniste, fait de ces interprétations des modèles de réussite chambriste. Et de cet enregistrement un événement discographique majeur. (Jacques-Philippe Saint-Gerand) Oscar Shumsky is heard in a live concert given at Berkeley in 1980. Capturing the violinist at his prime in splendidly recorded sound, this recital features two major violin works Shumsky never recorded commercially: Beethoven’s grand and passionate “Kreutzer” Sonata and the Bach Sonata in E minor arranged by Alexander Siloti, and the Prokofiev Solo Violin Sonata.
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