 Vous ne jurez que par Schütz, alors tentez donc ces Fontaines d’Israël coulées de la plume de Johann Hermann Schein en 1723, sept ans avant la disparition de cet autre maitre de la musique sacrée allemande. Schütz fut son ami, et non son rival, cela s’entend dans une confluence de leurs styles que Gregor Meyer et ses chanteurs exaltent plus qu’en aucune autre version venue d’outre-Rhin : le choix de cinq chanteurs et non d’une manécanterie ou d’un ensemble plus vaste, souligne l’italianité du recueil, italianité paradoxale, car contrairement à Schütz, Schein ne fit jamais le voyage transalpin. Ces Madrigaux savants, où la roideur luthérienne est pliée dans les polyphonies ultramontaines est l’un des chefs d’œuvre de la musique sacrée germanique de la première moitié du XVIIIe siècle, l’attention portée à l’éclat des mots comme aux étrangetés de l’harmonie, la souplesse du geste, l’attention aux dynamiques, tout me rappelle ici la magnifique version où jadis Philippe herborisait parmi les vingt-six opus. Vous les trouverez ici au complet. (Jean-Charles Hoffelé)  Johann Hermann Schein (Grünhain, Saxe, 1586 – Leipzig, Saxe, 1630) est Cantor à Saint-Thomas de Leipzig quand il publie, en 1623, le recueil de 26 motets ou « madrigaux spirituels », « à la manière d'un madrigal italien ». Avec ses amis Scheidt et Schütz (les 3 « S » du premier baroque allemand), il est un des premiers allemands à s'inspirer des nouveautés de la musique baroque italienne dans un contexte luthérien. Du motet, il garde l'inspiration religieuse et le texte biblique, le style contrapuntique, le tempo modéré, la métrique adaptée au texte. Du madrigal, les notes brèves, le discours émotionnel. Il atteint un haut degré d'émotion avec peu de moyens : 5 voix, dont 2 sopranos, et une basse continue (ici, violoncelle et orgue positif). Ainsi, l'ouverture de « Die mit Tränen säen » (Ce que nous semons dans les larmes, nous le récolterons dans la joie, psaume 126) réalise une étonnante hybridation du madrigal (chromatismes, usage de colorature, notes brèves) et du motet (texture imitative rigoureuse). Dans d'autres motets tel « Ich bin die Wurzel des Geschlechtes David » (Je suis la racine de la Maison deDavid, Apocalypse de Jean, 22) les chromatismes et les dissonances évoquent, par leur puissance expressive, les plus grands madrigalistes italiens contemporains. A l'occasion du 400ème anniversaire de cette publication Gregor Meyer et son Ensemble Opella Musica (du nom d'un autre recueil de Schein), qui se consacrent à la redécouverte du patrimoine musical baroque allemand, nous en donnent, dans cet album de deux CD, une fort belle interprétation, méditative et émouvante. (Marc Galand)  In the early 17th century, Italy was the wonderland of music, all new ideas and suggestions came from here, and whoever was a composer in the north - thus also in Germany - could not avoid these innovations, for example the "madrigalian manner". Johann Hermann Schein, too, enthusiastically embraced the southern stimuli as they reached the ears of German musicians in madrigals and sacred concertos from the beginning of the century, but he was never able to deny his musical upbringing and education rooted in German chapel and cantor tradition. This is especially true of his cycle of 26 sacred madrigals for 5 voices and b.c., the Israels Brünnlein - Fontana d'Israel, published in 1623, when Schein was already Leipzig's Thomaskantor. This cycle is virtually a combination of the German-Dutch motets tradition and the New Italian art of expression. Schein commands the various stylistic phenomena with aplomb, committed only to the affects and the expression. The collection is a step on the way to a more subjective, emotional practice of faith, as it then breaks through in Pietism.

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