Instruit par Zoltán Kodály, et ami de Béla Bartók, d’où ses collectes d’ethnomusicologie, étudiant le piano à Genève avec Bernard Stavenhagen, László Lajtha (1895-1963) reçut également, avant le début de la première guerre mondiale, les conseils de Vincent d’Indy à la Schola Cantorum, d’où sa francophilie affirmée et ses relations avec Le Triton, société musicale française (1932) comptant Ferroud, Messiaen, Rivier et Henry Barraud parmi ses membres. Ce sont donc les œuvres d’un compositeur complexe, ayant vécu une vie faite de privations et de renoncements en raison de la situation politique de la Hongrie après la seconde guerre mondiale, que présentent les membres du Flash Ensemble : Sadie Fields, Clément Holvœt et Romain Dhainaut. Comment peut-on songer à une audience internationale lorsqu’on a son passeport confisqué pendant plus de dix années ? En l’occurrence, sous l’étiquette de Nuits Transylvaniennes, ces interprètes nous proposent les trois Trios à cordes que composa Lajtha en 1927, 1932, et 1945. Le premier, en six mouvements, porte le sous-titre de Sérénade et fait se succéder une Marche évoquant en abyme l’entrée et la sortie des musiciens de ladite sérénade, une Canzonetta d’un transparent lyrisme avant un Fox Trot plein d’esprit, un Scherzo délibérément animé, un Dialogue à la polyphonie néo-classique sans retenue et enfin un retour conclusif de la Marche liminaire. Le second Trio (1932), dont c’est ici le premier enregistrement mondial, ne fut créé qu’en 1959 et porte une dédicace à l’écrivain pacifiste Romain Rolland (1866-1944). On voit dans cette œuvre s’ouvrir l’âme et les convictions du compositeur qui retrouve ici la forme baroque d’une Sonata da chiesa adaptée à son propos humaniste. Le troisième Trio, profondément inscrit dans l’amour que Lajtha ethnomusicologue vouait à cette région de la Hongrie avant les découpages modernes qui l’intégrèrent à la Roumanie au motif qu’elle était le cœur de la Dacie, porte d’ailleurs suggestivement des sous-titres qui imprègnent la musique d’allusions folkloriques retravaillées imposant aux interprètes de s’immerger avec maitrise et conviction dans un univers des quatre saisons fait de résonances complexes, y compris politiques : Soir de printemps, Soir d’été, soir d’automne, Soir d’hiver, lorsque, par exemple, Lajtha note dans la partition « Hors de Transylvanie » pour mieux rappeler le rapt dont cette région, dont il était si épris, a été victime. Les musiciens du Flash Ensemble, avec tout leur talent, défendent admirablement ces compositions peu connues qui méritent indéniablement une bien plus large audience. Fort recommandé. (Jacques-Philippe Saint-Gerand) Le premier album du Flash Ensemble ressuscite la musique de László Lajtha! Qui peut se targuer d’avoir été à la fois le jeune compositeur favori de Béla Bartók et l’ami des plus grandes figures culturelles parisiennes de son temps? Et d’avoir écrit les trios à cordes les plus ambitieux depuis Mozart? Compositeur d’une grande originalité alliant fougue latine et culture hongroise, László Lajtha est pourtant effacé des livres d’histoire, la faute aux démêlés qu’il eut avec le gouvernement de son pays qui confisqua arbitrairement son passeport et entrava la propagation internationale de son oeuvre. Ses trios à cordes repoussent les limites instrumentales et reflètent à merveille sa diversité : une Sérénade espiègle, un deuxième trio digne des chefs-d’oeuvre du XXe siècle, et des Transylvanian Nights contant la Transylvanie au gré des saisons. Il est grand temps de redécouvrir cette musique savante, incomparable, et surtout immédiatement séduisante! Flash Ensemble’s debut recording explores the largely undiscovered works by László Lajtha. The complete string trios by Bartók’s favourite young Hungarian composer are remarkable for their breadth and depth of feeling, their virtuosic technical demands, and their unique textural landscapes – infused with both the folk elements of his native land and the Parisian atmosphere in which he thrived. Lajtha’s musical voice was silenced by his political troubles in communist Hungary, but his wealth of original and touching chamber music certainly deserves to be discovered, heard, and celebrated by musicians and listeners alike.
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