Les Nations parurent alors que l'Europe, tourmentée par les guerres, retrouvait la paix et que se manifestait, notamment à Paris, une ouverture aux autres cultures. On relativisera cependant : le cosmopolitisme véhiculait alors surtout des stéréotypes. En outre, l'œuvre définitive de 1726 (30 ans après son embryon), rebaptisait Françoise, Espagnole et Piémontaise des sonates dans le style de Corelli dont les titres initiaux n'avaient que faire des « nations ». S'ajoutaient une nouvelle sonate expressément intitulée l'Impériale (pour l'Empire germanique) et, complétant chaque sonate une suite à la française. En dehors de ce rapport établi, dans chaque « ordre », entre formes françaises et italiennes, on peut s'interroger sur la nature et la réalité du particularisme "espagnol" (2e ordre) ou "germanique" (3e). La présente version n'est pas celle pour effectif flexible d'instruments divers généralement enregistrée, mais celle pour 2 clavecins que Couperin exécutait selon ses dires « en famille, et avec mes élèves » reconnaissant à cet instrument « un brillant et une netteté qu'on ne trouve guère dans les autres instruments ». La présente interprétation confirme ô combien ce propos du compositeur : une impression de plénitude, un pouvoir de suggestion orchestrale extraordinaire dans un jeu varié, dynamique et enthousiasmant. Grand art des combinaisons sonores, sur 2 instruments très bien choisis, et palette de couleurs d'une grande richesse. Délicatesse, emportement, subtilité dans une atmosphère festive, luminosité, pleine lisibilité. Quel dommage qu'il manque le second ordre ! (Bertrand Abraham) François Couperin, the main representative of a dynasty that dominated French music from the 16th well into the first half of the 19th century. In 1726 Couperin published his own musical atlas. According to the most plausible reconstructions based on the surviving manuscripts, the author had picked up three sonatas from a series of six trio sonatas written on Corelli’s model of “sonata da chiesa” (four movements, typically alternating slow-fast-slow-fast). These three chosen works were renamed this way: La Pucelle became La Françoise, La Visionnaire turned into L’Espagnole, L’Astrée into La Piédmontoise. To these three works Couperin added a fourth, the most extended of all, called L’Imperiale. To each Sonata, he further added a French Suite whose length suited diplomatic protocols: eight dances each for France and Spain, nine for the Holy Roman Empire, six for Piedmont. In all, four ordres for those Catholic powers that, in a typically French-centred perspective, were considered natural allies in the effort to break the siege by a hostile geopolitical bloc: Anglican Great Britain, Lutheran Prussia and Sweden, Orthodox Russia. Couperin himself writes in the preface to L’Apothéose de Lully: “[...] the complete book of trios that I hope to publish next July (Les Nations), can be played on two harpsichords, as well as on any other instrument.
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