 La formation musicale de Wolfgang Rübsam s’est, presque d’emblée, inscrite dans un cadre international. Élève de l’immense Helmut walcha qui connaissait par cœur toute la production pour clavier de Bach dont il enregistra entièrement l’œuvre pour orgue (interprétation qui suscite toujours l’admiration), il réédita toutes les partitions du Cantor et fut même un précurseur de la vague de renaissance de la musique baroque, il suivit aussi en France les cours de Marie-Claire Alain, et, ayant remporté en 1973 le concours d’orgue de Chartres qui le fit reconnaître, partit l’année suivante aux États-Unis où il enseigna et vécut (il est allemand et américain). Ingénieur du son par ailleurs, il n’a rien de ces génies musicaux blasés qui étant de partout, ayant pratiqué tous les styles, ne sont de nulle part, et pratiquent une musique « universelle » sans saveur. Tout au contraire : il est tout aussi « authentique » dans Bach que dans Vierne, au clavecin, qu’à l’orgue ou au piano moderne, ce dont témoigne d’ailleurs le présent coffret qui s’inscrit dans l’entreprise qu’en musicien très historiquement informé (mais à sa manière) il a conçue ces temps derniers. Il aura attendu sa 77e année pour enregistrer pour la première fois le Clavecin bien tempéré, sur un instrument dont il s’est fait le chantre et qui, selon Roland de Candé serait né de l’esprit inventif de Bach en personne : le clavecin-luth. Bach en possédait deux auxquels il était particulièrement attaché. « Plus court qu’un clavecin ordinaire, l’instrument avait 2 chœurs de cordes en boyaux et une octave courte en cordes de laiton. Avec un seul registre, il sonnait plus comme un théorbe que comme un luth». Mais avec d’autres registres dont celui de luth, justement, d’autres cordes vibraient par sympathie. Le timbre paradoxal de l'instrument, à la fois doux, feutré et métallique, délicat et affirmé, sa profondeur et sa légèreté, sa pudeur et son grain délié, son fonctionnement qui l'apparentent un peu au « bloc magique de Freud » —sorte de machine d'écriture à palimpseste,enregistrant sous une première couche de cire comme des traces mnésiques — ne sont pas sans répercussion sur le toucher et la vitesse d’exécution de l’interprète, plus lente que sur un clavecin conventionnel. Sur ses stratégies de jeu, pourrait-on dire. La rhétorique des formes s’affirme ici avec une rigueur, une attention, un soin indéniables, Mais on sent une respiration inédite, on a comme l’impression d’une grande liberté qui a été constamment pensée et négociée mais paraît naturelle. Ce coffret de 5 disques nous invite à une expérience sonore vraiment indicible. Ce clavecin bien tempéré, avec ses harmonies, ses résonances et ses reflets tendres et secrets, ses articulations sages et posées, la distinction et l’« anima »-tion » qui l’inspirent, revêtent un charme vraiment subtil, varié, chantant et calmement saisissant. Un miracle sans cesse renouvelé ici. (Bertrand Abraham)  A renowned organist transfers his decades of experience as a Bach player to the harpsichord, for his first recording of The Well-Tempered Clavier. ‘I was surrounded by music as a child,’ recalls Wolfgang Rübsam, and he was thrilled when he could clamber up to the piano seat at the age of three to imitate the pupils of his parents, both of them music teachers. For the last 70 years and more, Rübsam has immersed himself in the world of the keyboard, and in the music of Bach in particular, making records first of all for Philips, then Naxos and latterly Brilliant Classics, all of them warmly welcomed for the fidelity of their style and the colours of their phrasing, whether played on harpsichord, organ or modern piano. At 76, Rübsam is undoubtedly one of the Bachians of our time, and yet until quite recently his long and distinguished discography has included no recording of the single most central collection to Bach’s output as a keyboard musician, the two volumes of preludes and fugues which he wrote both as a method of instruction for the budding keyboard player and as a library of his own mastery of the contrapuntal arts. Rübsam’s chosen instrument for this recording is the lute-harpsichord: a unique keyboard instrument with a unique sound that Bach apparently cherished. It is more forceful than the clavichord but less brilliant than the conventional harpsichord, requiring a touch of its own. According to Fanfare magazine’s review of the set when originally released, ‘I thought I’d heard it all. I was mistaken, and never, on any instrument, have I encountered a take on these masterpieces that breathes such new life into them.’ This set is now widely available on CD for the first time, and joins Rübsam’s other recordings on the lute-harpsichord for Brilliant Classics, of music by Bach and Weiss, as well as a complete set of the organ works by Louis Vierne.

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