 J’ignorais jusqu’ici l’existence même de ce compositeur polonais absent de la plupart des grands dictionnaires musicaux européens et à propos duquel on ne trouve sur Internet que de rares et succinctes notices. Après des études de chimie, il se consacra à l’orgue, au piano, à la composition. Chargé de cours au conservatoire de Lviv (1951-1973), il collabora avec le Théâtre polonais de cette même ville, mais ses convictions religieuses lui valurent, semble-t-il, d’être victime, durant les années 1970, de persécutions diverses, infligées par le régime communiste. Il dut attendre la décennie suivante pour se voir pleinement reconnu comme pédagogue, compositeur et interprète. Nommé, notamment, à l’université catholique de Lublin, il reçut des prix prestigieux, dont un pour l’ensemble de son œuvre. Sur celle-ci, assez prolifique (140 numéros d’opus environ, dont 50 de musique religieuse et de très nombreuses œuvres pour piano) le texte d’accompagnement du CD, mélange de banalités et de considérations confuses n’est pas d’un grand intérêt. Sont réunies ici les 3 sonates pour piano : les deux premières constituées d’un seul mouvement où différents tempi se succèdent, la troisième, plus longue, plus classique de par sa construction en trois mouvements, qui s’avère très riche et inventive. L’opus 7 progresse par essaimage-expansion à partir de cellules « narratives », parfois répétées et variées, mobilisant rapidement presque toute la tessiture de l’instrument au moyen d’arpèges, de sauts, et d’ornements. L’insistance, parfois presque obsessionnelle de certains traits y est comme propulsée par une dynamique jamais en repos. De là une impression constante de fluidité, de clarté, qui sait faire miel des dissonances, et une palette prodigieuse de couleurs et de timbres. Si elle emprunte encore au romantisme, et notamment à un Chopin comme « élargi », cette musique raconte réellement quelque chose de personnel qui prend et saisit. L’opus 16 présente des analogies frappantes avec le précédent dans sa structure compositionnelle, mais s’en distingue par des passages plus intimistes, moins éclatants, mais plus méditatifs (passage lent qui suggère comme une invention de Bach). Le troisième mouvement de l’opus 22 est admirable dans son caractère obsédant, percussif, ses précipitations à la Bartok, ses jeux de résonance. Dommage que ce CD soit si court. Une découverte totale. Vivement d’autres œuvres de ce même compositeur. (Bertrand Abraham)  Andrzej Nikodemowicz (1925–2017) was a versatile composer. His music was inspired mainly by broadly understood spirituality, close to the sphere of sacrum – a large part of his achievements are cantatas, rooted in the tradition of religious music, but he also tried his hand at instrumental forms, not shying away from modern techniques and sonic quests. The piano was a particularly important instrument for the composer. He knew how to extract from it a cosmos of colours, a condensed sonic matter, the spectrum of which contained a palette of orchestral-like sounds. Those qualities can be perfectly heard in the compositions presented on the album: three Piano Sonatas, Op. 7, 16 and 22, composed in 1947–1958. This album is also the world recording premiere of those works. The traditional rules of the sonata genre were modified here; the sound is massive and saturated, and the expression is intensified by the extraordinary technical challenges faced by the performer. However, it is not only about bravado and showmanship; the compositions adhere to an iron compositional logic, and it is to that logic that the virtuosity is subordinated. Nikodemowicz’s Sonatas are performed by Gajusz Keska, an extremely talented Polish pianist, winner of numerous national and international piano competitions, soloist and chamber musician performing at many prestigious festivals and in renowned concert halls in Europe. Moreover, he has outstanding achievements in the field of music pedagogy.

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