 Deux frères Scharwenka naissent successivement dans la Pologne du grand-duché de Posen au mitan du XIXe siècle. Xaver (1850-1924), le benjamin, fera la grande carrière de pianiste virtuose que l’on connaît. Mais, Philipp (1847-1917), moins extraverti et plus attiré par la composition et l’enseignement, est une personnalité sur laquelle il est mérité de s’arrêter. Formé à Berlin à l’école de Theodor Kullak (1818-1882), Philipp s’affirme comme compositeur et voit ses premières œuvres interprétées dès 1874. Lorsque Xaver fonde le Conservatoire Scharwenka (1881), Philipp se joint au corps professoral, enseignant la théorie musicale et la composition, et participe à l’élaboration d’une esthétique musicale comblant le vide séparant l’intimité nostalgique Brahmsienne de la rutilance orchestrale de Richard Strauss. Il s’acquiert la reconnaissance de Reger et formera le grand chef d’orchestre Otto Klemperer (1885-1973). Largement méconnue son œuvre orchestrale ne suscite guère d’intérêt aujourd’hui. En revanche son œuvre de musique de chambre connaît un discret regain de notoriété. Quant à son œuvre pour piano, en dépit de l’intégrale entamée par Luís Pipa (Toccata Classics), elle est largement ignorée et sous-estimée. Le programme de Çagil Cansu Sanlidag (1991-), pianiste turque, permet de découvrir en presque première mondiale quatre œuvres de Philipp Scharwenka qu’elle caractérise de manière très naturelle, donnant à la fois de l’élan passionné aux moments virtuoses, mais surtout beaucoup de tendresse aux épanchements plus intimes, cherchant sans cesse la lumière chaude, plutôt que la volubilité pianistique plus distante. La Ballade Op. 24, avec son thème chromatique initial énoncé mystérieusement à la main droite, installe l’atmosphère générale que prolongent les Abendstimmungen de 1895, une des deux Rhapsodies de 1891 et le Scherzo de 1896. Poète nocturne, Philipp Scharwenka bénéficie ici d’un discours pianistique raffiné, nourri d’un engagement tout à fait sincère pour cette musique au cœur débordant. Une entreprise opportune à saluer ! (Jacques-Philippe Saint-Gerand) Philipp Scharwenka, compositeur et pédagogue d’origine polonaise, s’est imposé comme une figure clé de la musique berlinoise du XIXe siècle. Pianiste accompli et professeur respecté, il co-fonda le Conservatoire Scharwenka, tout en laissant une oeuvre mélancolique et dramatique, reflet d’une vie intérieure profonde. Son influence, bien que discrète, a traversé les frontières, de Berlin aux États-Unis. A composer and pedagogue of Polish origin, Philipp Scharwenka established himself as a key figure in 19th-century Berlin’s musical scene. As an accomplished pianist and respected professor, he co-founded the Scharwenka Conservatory while leaving behind a body of work marked by melancholy and drama, reflecting a deep inner life. His influence, though subtle, crossed borders from Berlin to the United States.
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