Johann David Heinichen (1683-1729) est surtout connu de nos jours comme théoricien de la musique, avec son traité sur la basse continue, où il donne la forme définitive du cycle des quintes, représentation géométrique entre les douze degrés de l'échelle chromatique, leurs altérations correspondantes et la tonalité majeure ou mineure associée. Il étudia d'abord la musique à la Thomasschule de Leipzig, avec Johann Kuhnau. Parallèlement, il suivit des études de droit, et exerça comme avocat tout en composant des opéras pour Leipzig. En 1709, il décide de se consacrer entièrement à la musique. Tout d'abord, il décide d'étudier à la source la musique italienne : Il réside en Italie de 1710 à 1716, à Venise surtout, et à Rome. A son retour, en 1717, il est nommé Kappellmeister à Dresde. Il y compose nombre de cantates, de sérénades, de la musique instrumentale (il est aussi un bon claviériste), dans un style cosmopolite et galant, ainsi que de la musique sacrée. Les deux Oratorios de la Passion présentés dans cet album, sur des livrets du poète attitré de la cour de Dresde Stefano Benedetto Pallavicino (fils du compositeur italien Carlo Pallavicino), suivent le modèle de l'operia seria, qui prend son essor dans les années 1720 : Courte ouverture instrumentale ou chorale, alternance d'arias et de récitatifs, et quelques duos, trios et quatuors vocaux. Le premier « Come ? S'imbruna il ciel ! », composé en 1728, narre le tremblement de terre survenant au moment de la mort du Christ sur la croix, ainsi que les sentiments des témoins au pied de la croix : Marie-Madeleine, l'apôtre Jean, la Vierge Marie, ainsi qu'un centurion. Le second « L'aride tempio ignudo », composé sans doute en 1724, met en scène des allégories : L'Amour divin affronte la Mort qui croit triompher, la Pénitence ouvre la voie à l'Espoir de la Rédemption. Les mélodies sont plaisantes, les voix agréables : Cet album d'inédits est une bonne introduction à l'oeuvre de ce compositeur resté dans l'ombre de ses grands contemporains, Telemann, Bach... (Marc Galand) The Passion music Johann David Heinichen wrote for the Dresden court is a document of cultural and confessional openness of the Saxon residence, and his two Italian oratorios heard here are surrogates of large-scale Passion music. "Come? S'imbruna il ciel" - composed in 1728 - is the latest of the sepolcri, his other Passion "L'aride tempie ignude" the first of the sepolcri to survive from Heinichen in Dresden. Both texts are by Stefano Pallavicino, who had been active at the Dresden court since 1719. In the first-mentioned Passion, the meditation on the Passion event recurs to the experience of the earthquake that, according to biblical accounts, occurred immediately after the death of Jesus. The description of the violent natural events gives Mary the Mother of God, John (Jesus' favorite disciple), and Mary Magdalene an opportunity to reflect on their relationship to the Crucified. Different aspects of affection and love are thematized. The meditation on the Passion event in the second-named Passion is designed as an allegorical play of death (Morte) and hope (Speranza), divine love (Amor divino) and penance (Poenitenza), and follows an easily comprehensible dramaturgy. The affinity to opera seria is evident in both passions not only in the arrangement of the pieces. The keys, gestures and instrumentation also correspond to the models familiar from baroque musical theater. Full of affect!
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