 Gabriel Édouard Xavier Dupont eut la malchance de porter un nom le prédisposant à l’anonymat et d’être en même temps victime de cette tuberculose qui fit tant de ravages à la fin du XIXe siècle. Malade et hôte fréquent des sanatoriums et maisons de convalescence, Dupont, né à Caen, fils de l’organiste de l’église Saint-Pierre, bénéficia en sa toute jeunesse des conseils de Massenet puis, à partir de 1895, de Widor, qui en admirait le jeu d’orgue et les premières compositions. Auteur de trois opéras, de nombreuses mélodies d’après des poèmes de Verlaine, Rimbaud, Rodenbach, Blémont, Richepin, Klingsor, le parcours de Dupont marque la transition du vérisme à l’impressionnisme. Restent essentiellement aujourd’hui dans les mémoires ses deux grands cycles d’œuvres pour piano : "Les Heures dolentes", ici enregistrées, composé en 1903, et "La Maison dans les dunes" (1908-1909), auxquels des pianistes comme Daniel Blumenthal, Marie-Catherine Girod, Émile Naoumoff, Stéphane Lemelin, François Kerdoncuff, Nicolas Stavy, ont redonné vie. C’est maintenant au tour de Giuseppe Taccogna (1991) de présenter son interprétation des quatorze pièces composant "Les Heures dolentes". Face à une musique qui s’inscrit dans un ambitus émotionnel restreint du fait des conditions autobiographiques de leur inspiration, la tâche de l’interprète est d’infuser dans ces quatorze pièces les caractères et humeurs fixant les moments d’une vie dont le compositeur perçoit l’inexorable fuite. Certes, « Du Soleil au jardin », « Après-midi de dimanche », « Coquetteries », « Des Enfants jouent dans le jardin » ou « Nuit blanche – Hallucinations » laissent éclater des accents tourmentés et fiévreux, parfois animés de cette joie qu’exsude souvent curieusement la mélancolie ; mais, entre « Le soir tombe dans la chambre », « Chanson de la pluie », « Une amie est venue avec des fleurs », « La Chanson du vent », « La Mort rôde » et « Calme », la dernière pièce du cycle, il faut tout l’art de l’interprète pour captiver l’attention d’un auditeur submergé de langueur et de tristesse comme dans les Insomnii de Niccolo’ Van Westerhout (1857-1898). En dépit d’une prise de son rapprochée qui accentue souvent par trop l’impression de l’enfermement vécu par le compositeur, Giuseppe Taccogna fait valoir ici de belles qualités expressives et pianistiques. Nous donnera-t-il son interprétation de "La Maison dans les dunes" ? (Jacques-Philippe Saint-Gerand)  Born in 1878, Gabriel Èduard Xavier Dupont entered the Paris Conservatoire at the age of 15, studied with Massenet and Widor, and scored an early success with an opera performed at La Scala, before he died of tuberculosis at just 36. Dupont was already gravely affected by the condition as a teenager, and wrote this hour-long piano cycle between 1903 and 1905. Over the course of 14 movements, Les Heures Dolentes (‘The Sad Hours) depicts the observations of an invalid as he contemplates the world from his sick-bed. Beginning in relative calm, the cycle gradually increases in intensity, punctuated by periods of respite and consolation (‘Une amie’ arrives with flowers) and impressions of life outside (children playing in the garden), before the culmination of the climax in the penultimate piece (‘Nuit blanche – Hallucinations’), and a final return to calm, which leaves the listener a choice between hope and death. But for his early death, Dupont might have been one of the most renowned and admired voices in musical Impressionism. A modern revival of interest is bringing to light his major works, which focus on music for the stage and for the piano: this release is the first in a series from Piano Classics documenting his complete piano output, which includes a second major cycle, La Maison dans les dunes. This too will be played by Giuseppe Taccogna, a pianist from the south of Italy who still lives and teaches there as a specialist in Romantic and late-Romantic repertoire such as Dupont and Rachmaninov. Taccogna’s own survey of Dupont’s life and work is printed in the booklet of this studio recording, which was made near the city of Bari late in 2022.

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