Un virtuose absolument démon de la flûte à bec, d’une technique époustouflante et d’une musicalité sans failles. Cet enregistrement singulier constitue une "défense et illustration" de la transcription pour flûte à bec solo de pièces baroques comptant parmi les plus brillantes et exigeantes en matière de vélocité, d'éclat et d'inventivité, conçues pour des instruments solo plus performants et prestigieux qu'elle : le traverso qui la supplanta dès les années 1720 et surtout, le violon, parangon de la haute virtuosité aux 17 et 18e siècles. Déjà attestée au Moyen-Âge, la pratique de la transcription est surdéterminée par des facteurs nombreux, hétérogènes, paradoxaux voire contradictoires qui ne peuvent être analysés en détail ici. Précisons simplement que les deux seuls opus à figurer intégralement sur ce CD de pièces transcrites (le BWV 1013 de Bach père et le Wq 132 de son fils Carl Philippe Emmanuel) n'ont pas attendu H. Franco pour figurer parmi les "standards", au répertoire des flûtistes à bec d'aujourd'hui. On n'est ici, pas si loin de la transcription dont l'initiative revenait au compositeur lui-même, chose assez courante à l'ère du baroque. On reste en outre encore "en famille", dans le fief des flûtistes. Les autres transcriptions gravées sur cet album sont, pour l'essentiel, conçues par l'interprète à partir de mouvements isolés qu'il a choisis dans l'œuvre monumentale pour violon solo du Cantor. À l'inverse et comme à rebours de G. Leonhardt qui a, quant à lui, transcrit dans son intégralité ce corpus pour le clavecin, instrument polyphonique — le parant ainsi d'un riche soubassement, H. Franco s'impose, sur son impécunieux instrument, un défi redoutable et des conditions drastiques d'exécution. Son ingéniosité, ses prouesses techniques, la haute voltige de son jeu ébouriffant auront beau vous scotcher et vous éberluer, l'émotion artistique n'est pas au rendez-vous, entravée qu'elle est par la sophistication des stratagèmes qu'il faut déployer pour réduire l'écart entre les deux instruments et traduire sur la flûte à bec les moindres traits de l'« idiolecte » violonistique. En dépit de tout, la dexterité tourne à vide et la virtuosité semble devenir une fin en soi. (Bertrand Abraham) Voilà un disque original : Horacio Franco a transcrit pour flûte à bec quelques-uns des mouvements les plus redoutables des Sonates et Partitas pour violon seul de Bach, comme la Fugue de la Sonate BWV 1005 ou la grande Chaconne de la Deuxième Partita BWV 1004. Et le résultat est prodigieux, la virtuosité étincelante, ébouriffante, la polyphonie retraduite avec intelligence. Même si ces œuvres n’appellent véritablement qu’un seul instrument, le violon, on ne peut qu’admirer la performance, toujours inspiré d'Horacio Franco (Pierre-Yves Lascar)
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