Bruch Moïse op 67 Volle Gambill Whitehouse Flor - C438982 - Orfeo - Classique - Nos labels

Arnold Schoenberg savait-il en se mesurant à ce défi longtemps ajourné de mettre en musique son "Moise et Aaron" qu’il avait eu un prédécesseur ? Max Bruch du moins acheva son monumental oratorio, l’un des opus majeurs du genre en Allemagne après les chefs d’œuvre laissés par Mendelssohn, ce dont les contemporains de la création ne prirent guère la mesure, Brahms lui-même en raillant le médiocre élan spirituel. Les tableaux vivants qu’il entend proposer le sont assez peu, celui du "Veau d’or" le prouve, l’écriture chorale est habile mais l’orchestre, malgré les efforts de Claus Peter Flor, gris trottoir, l’élan manque souvent, ce qui ne devra pourtant pas empêcher d’entendre l’œuvre, car le disque offre un Moses saisissant : Michael Volle, en ses premières années y est déjà un peu Wotan et tout à fait le Hollander, on l’écoute, emporté par ce timbre si noir, vrai prophète qui sait tonner quant il doit, et dont la mort au Mont Nebo est admirable. Roberto Gambill ne lui cède que peu, Aaron impérieux et l’Ange d’Elizabeth Whithehouse donne envie de mieux connaitre cette belle soprano. Une interrogation demeure. Qu’est devenu le Max Bruch audacieux qui se saisissait tout juste trentenaire de l’"Odyssée" ? Ici, malgré l’excellence des interprètes le métier aura remplacé l’inspiration. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)

Ce "Moses" de Max Bruch prolonge en quelque sorte la tradition de l’oratorio biblique depuis Mendelssohn. Si le sujet connaît de fameux précédents, "Israël en Egypte" de Haendel ou C.P.E. Bach "Die Israeliten in dër Wuste" (1775), Bruch s’attache lui particulièrement au personnage de Moïse. Une fois trouvé un bon librettiste, le théologien Ludwig Spitta (Frère de Philip, le spécialiste de Bach), le compositeur s’attaque à la composition de son "Moses" début 1894. L’année d’après, la création dirigée par Bruch lui-même à Barmen n’eut pas l’heur de plaire aux critiques notamment Brahms qui qualifie l’inspiration religieuse du compositeur de faible voire d’exécrable (Lettre à Clara Schumann, 1895), une allégation d’autant plus imméritée que Bruch était guidé pendant son travail d’écriture par une inébranlable sincérité, un "sentiment fort et profond du divin". L’oratorio fort bien construit et d’une lumineuse lisibilité (merci Spitta) comprend quatre parties (Le Mont Sinaï, Le Veau d’Or, le retour de Canaan, la Terre promise) alternant de nombreuses et puissantes scènes chorales convoquant le peuple, de longs récitatifs et quelques ariosos des trois protagonistes Moïse, Aaron et l’Ange du Seigneur. Solidement épaulé par un chœur et des solistes remarquables, le chef du symphonique de Bamberg Claus Peter Flor s’attache avant tout à restituer le sens d’une partition sans grande originalité stylistique mais d’une merveilleuse intensité dramatique qui s’achève par une sublime prière sur le destin d’Israël et la mort de Moïse au mont Nebo. (Jérôme Angouillant)