 Dans une nuit sans lune, dans un presque rien de son, Béla Bartók fait sourdre la timbale. Les premières mesures de la Sonate pour deux pianos et percussion résonnent comme une création de l’univers musical. Un arsenal d’instruments frappés ? Une symphonie de timbres nocturnes répondent Cédric Tiberghien et François-Frédéric Guy dont les pianos errent où fulgurent, piqués à vif par la morsure de la cymbale, brûlés par la nuée ardente du xylophone, chavirés par cette timbale qui roule un océan. Dieu, quelle œuvre ! où Bartók largue les amarres, n’entendant plus que la musique d’un nouveau monde dont il fut longtemps le prophète. Ici il l’incarne dans son opus le plus radical, un point de non retour qu’il essaiera d’habiller d’un orchestre en 1940, vainement. C’est la rédaction initiale qui renferme la poésie désespérée, le long cri dans la nuit, les jeux de forme savant et pourtant esseulés, la beauté noire d’un cosmos de sons où la moindre lumière se diffracte, révélant des abysses plus profonds encore. Le finale hungarisant peut venir, les deux amis le font filer droit, ballets fulgurant où sonne comme une fanfare de fifres et de hautbois avec quelque écho du Mandarin merveilleux pour mieux se dissoudre dans le paysage. J’ai déjà entendu cette manière brillante et profonde : Robert, Gaby Casadesus et leurs percussionnistes, auteur d’une gravure indémodable, leur auraient-ils montré ce chemin ? En tous cas la fusion des quatre instrumentistes tient de la pure magie. Avant cette merveille, Cédric Tiberghien aura en encadré trois cahiers d’inspiration populaire - Chants populaires hongrois du District de Csik, Sonatine (avec cornemuse et ours), Rondos sur des mélodies populaires slovaques – par la Sonate, comme disséquée, à l’envers absolu du geste abrupt qu’y mettait récemment Benedek Horvat, et le génial cahier des Etudes op. 18. Partout son clavier de plein orchestre rayonne, doigts alertes, sonorités conquérantes. Décidement cette anthologie du piano de Bartók confine au génie, et peut regarder sans ciller l’intégrale de Zoltan Kocsis. C’est dire… (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)  A welcome return to the piano music of Béla Bartók and a programme which includes the popular Sonatina, the aggressively experimental Op 18 Études and the Piano Sonata of 1926, the composer’s ‘year of the piano’. Cédric Tiberghien is then joined by François-Frédéric Guy, Colin Currie and Sam Walton for the Sonata for two pianos and percussion—a high-spirited conclusion to this successful mini series.
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