Décidément peu courues depuis que Glenn Gould les a révélées au disque, les trois Sonates pour piano d’Hindemith sont piégeuses : la grande Première, évoquant le Main, n’est pas si éloigné de la poétique de Berg, et à son image semble prendre congé du romantisme tardif. Agnieszka Panasiuk en saisit bien le caractère ambigu, mais masque les références à Bach que Glenn Gould soulignait à loisir. Elle trouvera mieux le coté ironique de la brève petite Sonate en sol majeur, œuvre inclassable et à sa façon un rien iconoclaste dans son brio même, mais elle sera définitivement chez elle dans la Troisième, ne craignant pas de s’y montrer éloquente pour mieux rappeler que jamais Hindemith ne rendit un hommage aussi évident aux ultimes Sonates de Beethoven. Elle abandonne cette relative prudence qui la contraignait dans la Première Sonate, ardant l’immense fugue finale, proposant une véritable alternative au geste plus rhétorique de Glenn Gould, en cela son disque mérite de figurer au côté de celui du pianiste canadien, bel ajout à une discographie inexplicablement mince. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé) Quel beau piano ! Capté d’un peu près, mais avec de superbes couleurs, le récital de la pianiste polonaise Agnieszka Panasiuk réunit, ce qui est assez rare, les trois sonates pour piano du compositeur allemand. Davantage connu pour sa musique orchestrale et concertante, Paul Hindemith réserve un répertoire intéressant pour le piano, en opposition frontale au romantisme et symbolisée par le célèbre cycle du "Ludus Tonalis". Datées de 1926, les trois sonates furent composées dans un même élan. La première, sous-titrée "Der Main" (le Main) célèbre le fleuve et réclame une pensée affûtée pour maintenir la tension rythmique, ce que réalise l’interprète. Les deux opus suivants sont d’un abord plus séduisant. La deuxième, avec son côté néoclassique et son humour "à la Prokofiev"demande à la fois de l’insouciance et de l’esprit et c’est ici une réussite. La troisième joue avec les formes complexe et il faut une certaine élégance pour s’extraire d’une architecture complexe et dont les idées ont sans cesse besoin d’être animées. A la suite des Glen Gould, Sviatoslav Richter et Earl Wild, Agnieszka Panasiuk relève bien le défi et son enregistrement est une réussite. (Jean Dandrésy) Hindemith’s three piano sonatas from 1936 are a musical record of a difficult period in the life of the repressed composer, one of the creators of the new tonality. Serious marches, a bold fugue, lyricism, grotesque, transparent texture and distant echoes of the Baroque period – all this can be found in the brilliant interpretations of Agnieszka Panasiuk, a soloist and chamber musician performing in many countries. In her creation, the Sonatas seem to form a monumental whole one could listen to in one go.
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