 Marc André Hamelin ébroue le rire qui agite les premières mesures de la Sonate en ré majeur, et soudain c’est comme si Mozart la jouait lui-même, capricieuse, piquante, désinvolte jamais pourtant. Pas une once de cette majesté que tant y mettent, mais de l’esprit à revendre et dans la facture du jeu une profondeur qui laisse entrevoir une dimension supplémentaire : pas tout à fait la nostalgie, mais la lumière produit toujours l’ombre. En appendice au premier disque le Rondo en ré majeur et la Gigue en sol majeur dont Busoni aimait tant la bizarrerie, et pour le second volume le Rondo en la mineur et la Fantaisie en ré mineur. On entre alors dans une autre dimension : le Rondo est phrasé comme un air d’opéra – c’est la Comtesse des Noces. Je ne l’avais jamais entendu comme cela, respiré, chanté, accentué, faisant des notes des mots. Et c’est Bach que Marc André Hamelin invite dès les arpèges qui ouvrent la Fantaisie. Le chant va se déployer, timbré, sculpté, porté. A-t-il entendu Lilli Kraus ? Probable, car il construit son interprétation comme le faisait la pianiste hongroise, usant des césures pour poser autant de questions. Tout ce double album rayonne d’une vitalité contagieuse mais qui sait interroger. Huit sonates parfaitement construites, au discours pensé, offrant des phrasés parfois surprenants, s’appropriant tous les espaces du clavier d’un Steinway au medium plein, aux aigus boisés, qui semble le même que celui joué déjà au long de l’anthologie des sonates de Haydn, serait-ce le début d’une intégrale qui ne dirait pas son nom ? Je l’espère tant l’équilibre atteint ici ne sacrifie pas la fantaisie. Surtout Hamelin joue à dix doigts, et cela change le discours mozartien, fait briller l’habillage polyphonique sans sollicitation. Chaque instant est prodigieusement vivant (Discophilia, Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé)  Au-delà de son côté « greatest hits » un peu facile, on peut parcourir le programme proposé de différentes manières : hommages à la famille Bach (Jean-Sébastien -KV 576 et 574-, Jean-Chrétien seul -KV 332 et 333- ou associé à Carl Philipp Emanuel -KV 485-), chronologie (1774-75, 1778-79 et 1786-89), itinéraire initiatique (des sonates « faciles » ou « parisiennes » prétendument pour jeunes pianistes à la dernière -KV 576- via quelques ovnis introspectifs -KV 397 et 511-), etc. Hélas, le pianiste ne nous éclaire guère. Très technique mais semblant peiner à trouver un ton dans ces œuvres à la discographie pléthorique, il se focalise sur leur aspect pédagogique et « galant » (que martèle avec insistance la notice) et surcharge le propos de tics pianistiques qui accréditent les accusations de maniérisme ou de mièvrerie parfois portées contre cette musique (innombrables ralentis et accélérations, effets de main gauche, accords arpégés, et autres…). Quelques reprises pourtant écrites sont omises : les sonates les plus faciles ne mériteraient-elles pas le même traitement que les autres ? Certaines pages résistent bien, surtout les mouvements vifs conclusifs où articulation et dynamique font merveille. Au total un Mozart facile à écouter, mais qui ne nous apprend pas grand-chose. (Olivier Eterradossi)  Musicien consommé et magicien virtuose, Marc-André Hamelin interprète huit des divines Sonates pour piano de Mozart. Ses quatre albums de Haydn ont été reçus avec enthousiasme—ce nouvel album de Mozart ne décevra point. Deux Rondos, une Fantasia et une Gigue résolument décalée viennent compléter ce double album enchanteur. Eight of Mozart’s divinely inspired Piano Sonatas here receive performances of mercurial inspiration from consummate-musician cum virtuoso-wizard Marc-André Hamelin. His four Haydn albums have enthralled—this new Mozart will not disappoint. Two Rondos, a Fantasia, and a decidedly quirky Gigue complete a delight of a double album.
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