Modest Moussorgski (1839-1881)
Boris Godounov, opéra en 1 prologue et 4 actes

Bryn Terfel, baryton-basse (Boris Godounov)
Kostas Smoriginas, baryton-basse (Andreï Chtchelkalov)
Jeremy White, baryton-basse (Nikitich)
David Butt Philip, ténor (Grigori)
John Tomlinson, basse (Varlaam)
Adrian Clarke, baryton (Mityukha)
John Graham-Hall, ténor (Le prince Vassili Chouïski)
Ain Anger, basse (Pimène)
Rebecca de Pont Davies, mezzo-soprano (L’aubergiste)
Harry Nichol, ténor (Missaïl)
Royal Opera Chorus
Renato Balsadonna, direction
Orchestra of the Royal Opera House
Antonio Pappano, direction
Richard Jones, mise en scène

On assassine le Tsarévitch dès la première scène. Richard Jones pose l’acte fondateur du drame de Boris Godounov d’emblée, le meurtre se rappellera sans cesse au long de cette mise en scène parfaite qui n’est que direction d’acteur, spectacle exemplaire qui se garde bien de toute relecture soi-disant "éclairante" et a l’élégance de ne convoquer aucun écho de la situation contemporaine. On est absolument chez Pouchkine et absolument chez Moussorgski, l’option de la version princeps (1869), son orchestration amère, son chant frustre, disent tout d’un choix drastique que la direction âpre d’Antonio Pappano avive encore. J’avoue, je ne l’attendais pas ici, quel sens du théâtre, quelle vérité dans les accents d’humanité (écoutez-le entourer les déplorations de l’Innocent, remarquable Andrew Tortise) comme dans le cérémoniel. L’autre événement de cette soirée devait être la prise de rôle de Bryn Terfel. L’acteur est prodigieux, surtout guidé avec tant d’art (et jusque dans une certaine retenue) par le geste de Richard Jones, mais aussi formidable que soit l’incarnation, il ne faut pas avoir en mémoire le bronze d’un Reizen, les abimes d’un Pirogov, affaire de timbre plus que de registre. Ne barguignons pas, ce Boris si humain, hanté est formidable à voir, quel saisissement ! Autre incarnation majeure, le Pimen d’Ain Anger, mais il est vraiment trop tard pour le Varlaam de John Tomlinson, aussi formidable acteur qu’il soit : la vagabond n’est pas qu’un rôle de composition. L’hôtesse formidable de Rebecca de Pont Davies équilibre justement entre la charge du portrait et la finesse du chant, et pour la tenue vocale et l’incarnation vipérine, David Butt Philip mérite tous les lauriers pour son Grigori. Autour de son nouveau Tsar Covent Garden aura donc assemblé une vraie équipe de chant dont le russe a été audiblement travaillé, c’est aussi l’un de secrets de tout Boris Godounov réussi, Moussorgski ayant calqué sa musique sur la prosodie de sa langue maternelle. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)

Le plus Russe de tous les opéras, existe en deux versions : une première de 1869, que Moussorgski a reprise et développée trois ans plus tard. Si cette seconde version est la plus populaire en Russie, la version originelle ici présente, plus âpre, plus sauvage, est la plus jouée en Europe. La mise en scène est somptueuse : le décor est en deux étages où alternent des jeux de lumière et de couleurs, des oppositions chaud/froid très travaillées. Y sont ainsi incarnés les souvenirs et les remords obsédants de Boris, et notamment la mort du tsarévitch de 7 ans jouant à la toupie, qu’il a fait assassiner, une scène muette qui se répétera tout du long de l’histoire, chaque fois plus prégnante, chaque fois laissant Boris plus abattu. Bryn Terfel, une des plus belles basse de ce siècle, endosse le rôle d’un Boris de plus en plus hanté par sa conscience, notamment lorsque son fils grandit — un Boris qui finit par perdre entièrement pied et qui meurt littéralement de souffrance, son âme déchirée par cet acte barbare qu’il ne peut pas effacer. À ses côtés, John Tomlinsson campe un splendide Varlam dans le fameux air « Dans la ville de Kazan » et Ain Anger un Pimen profond et habité. Ajoutez à cela des costumes de toute beauté, et une musique servie par un orchestre de premier plan, sous la direction d’un des plus grands chefs d’opéra, vous obtenez un DVD de première catégorie ! (Walter Appel)

Mussorgsky was inspired to compose his masterpiece Boris Godunov after reading Pushkin’s Shakespeare-inspired play of the same name. It features one of the most dramatically rewarding bass-baritone roles: a noble ruler who loves his children and his people, but whose thirst for power has led him to commit a terrible crime. Bryn Terfel is “a powerful new Boris” (The Observer) in Richard Jones’ new production of the original 1869 score. Antonio Pappano conducts an outstanding cast that also includes John Graham-Hall as the crafty Prince Shuisky and John Tomlinson as the vagabond monk Varlaam.