Marie Jaëll (1846-1925)
Ce qu'on entend dans l'Enfer
Ce qu'on entend dans le Purgatoire
Ce qu'on entend dans le Paradis

Viviane Goergen, piano

Enfant prodige, concertiste brillante, reconnue par ses pairs, élève de Moscheles, Franck, Saint-Saëns, amie de Liszt, dédicataire de certaines de leurs œuvres, professeur de piano au Conservatoire de Paris et première femme admise dans la Société Nationale des Compositeurs, Marie Jaëll fait partie de ces compositrices que l’histoire patriarcale de la musique a oubliée. En 1894, elle écrit une œuvre d’envergure pour piano. Composée de dix-huit pièces basées sur le texte de la "Divine Comédie" de Dante, elle relate l’amour de l’auteur pour Béatrice décrivant la marche de Dante de l’Enfer jusqu’au Paradis en passant par le Purgatoire. Se succèdent trois séries de six pièces constituées d’épisodes musicaux expressifs aux titres évocateurs. Les procédés d’écriture inventifs au service d’un figuralisme musical subtil rythment chacun d’eux leur attribuant des caractères et des couleurs sonores diversifiés. Intensité, virtuosité, profusion rythmique, écriture obsédante, recherches harmoniques, symbolique du Jugement Dernier avec l’usage varié des premières notes du thème du Dies Irae, motifs mélodiques incisifs et obstinés animent l’œuvre entre frénésie menaçante et clarté sereine. L’écriture affirmé de Marie Jaëll est ici novatrice, oserait-on dire précurseur d’une musique répétitive et minimaliste à venir associée à un post-romantisme crépusculaire que son ami Liszt n’aurait certainement pas désavoué. Une compositrice de premier ordre ! (Laurent Mineau)