Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Fidelio, op. 72

Richard Wagner (1813-1883)
Lohengrin
Parsifal
Les Maîtres chanteurs de Nuremberg von Nürnberg

Richard Strauss (1864-1949)
Die Frau ohne Schatten, op. 65

Giuseppe Verdi (1813-1901)
Othello

Hildegard Behrens, soprano
Peter Glossop, baryton
James King, ténor
Munich Radio Orchestra
Kurt Eichhorn, direction
Heinz Wallberg, direction

« Falke, mein Falke », ces mots là sont comme la signature sonore du vaste ténor de James King, Empereur désolé et perdu jusque dans la révolte. Florestan stellaire, Lohengrin inquiet, Parsifal définitif qui réunissait l’innocence et la blessure d’un trait de voix, ténor sombre et solaire à la fois, à l’allemand épuré que seul un yankee pouvait poétiser à ce point. De tous ces personnages, car James King ne tenait pas des rôles mais incarnait, le disque a abondamment documenté les souvenirs, récitals ou intégrales, mais pas ceux de son Otello. Ce sera la révélation de cette compilation, le saisissant à la scène lors de deux séries de représentations. Celles de 1977 dévoile une Desdemona sublime, Hildegard Behrens dans la voix irréelle, flottant dans l’éther, rappelle que cette Brunhilde fut d’abord chez elle dans le répertoire italien. Quel duo du I ! Qui confine à l’iréel, et face au rogue Iago de Peter Glossop quelle fureur, puis quel désespoir dans le presque rien de « Dio mi potevi scagliar » sur lequel tant de ténors passent sans rien en entendre (aux deux sens). Mais écoutez aussi la grande scène de l’Empereur de la Frau où Kurt Eichhorn, si méconnu et si génial pourtant, lui dresse un tel théâtre alors même qu’ils sont en récital. Et si Orfeo nous rendait son Otello au complet, mais quelle version choisir, celle de Munich 1977 partiellement documentée ici, ou la captation viennoise de 1974 avec Teresa Zylis Gara et Sandor Solyom-Nagy ? Les deux mon Général ! (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)

Le dernier des ténors héroïques ? Bien sûr, après lui, d’autres se montrèrent exceptionnels chez Wagner : Domingo donna au studio d’insensés "Tannhäuser" et "Tristan", inconcevables à la scène. Heppner, prudent n’alla pas au-delà de Siegmund, Kerl montra rapidement ses limites en Siegfried, Seiffert laissa un déchirant Tristan trop tard. Quant à l’inclassable Kaufmann, s’agit-il vraiment d’un tenor ? Wagner réclamait à ses chanteurs une ligne de chant, et King fut le dernier à avoir naturellement le format des rôles, à les phraser comme du bel canto, à ne jamais forcer, ni hurler, séduisant par l’autorité de sa projection et par la splendeur et la plénitude de son timbre. Orfeo nous propose un florilège de ses grands rôles en provenance de Münich : l’air de Florestan halluciné, tutoie la folie. Le second monologue de "Lohengrin" est phrasé tout en mezza-voce. "Morgentlich leuchtend" des "Maîtres Chanteurs" exhale tous les effluves du printemps. Le ténor américain se joue avec une aisance déconcertante de l’impossible tessiture de l’Empereur ("La Femme sans Ombre"). Et pour couronner cet exceptionnel récital, quel plaisir d’entendre une incarnation aussi juste d'"Otello", sans la brutalité d’un Del Monaco, ni les maniérismes d’un Kaufmann. Les valeureux Wallberg et Eichhorn sont de solides compagnons de route. Indispensable. (Olivier Gutierrez)