 Pour le mécréant que je suis devenu, après avoir été, d'ailleurs, de par mes origines parpaillotes, toujours étranger à la musique, à la liturgie et à la religion catholiques, ce CD est à tous égards un admirable monument sonore, une splendide cathédrale dressée comme un seul bloc mais parcourue par des souffles incroyablement déliés. Cette messe, qui est probablement la plus développée de toutes celles qui furent écrites durant la renaissance (elle dure plus d'une heure) et représente le sommet même de tout ce que l'école franco-flamande a pu produire est l'œuvre d'un compositeur indiscipliné, rebelle, qui mena une vie fort mouvementée à travers les Lage Landen (Les Pays-Bas dans leur acception la plus large en néerlandais, incluant la Belgique et La Flandre française) et jusqu'à Ferrare où il séjourna deux fois et où il mourut. Les influences italiennes sont chez lui peu profondes. Tout dans son écriture procède du cantus firmus, d'une architecture et d'une ordonnance rationnelle, de formules et de motifs traités en séquences variées ou obstinées. Il y a là une rigueur qui n'a rien d'austère, et une souplesse étonnante : le chant s'élance et reprend comme un vol d'oiseau, entêtant, enivrant, toujours renaissant et comme infatigable comme s'il cherchait à se saturer et à perdre conscience de lui-même alors la polyphonie reste d'une clarté, d'un éclat cristallin surprenant, se meut entre des plans de consistance dont la densité, la dynamique, la couleur mutent de façon subite ou se prolongent et s'approfondissent. Le silence est un plein creusé par le vide ou un vide toujours-déjà plein. L'œuvre est par ailleurs admirablement mise en perspective : elle est en effet précédée de deux "versions", l'une anonyme, l'autre attribuée à un certain Pfawenschwantz du cantus firmus qui lui sert de motif conducteur, tout comme elle est suivie de deux versions l'une polyphonique de Senfl, l'autre en plain-chant, anonyme du même motif. (Bertrand Abraham)  Jacob Obrecht’s Missa Maria zart is an extraordinary work, both literally, as probably the longest extant Mass of the Renaissance, taking an hour to perform, and in the more general meaning of the word. It is recognised as one of the most ambitious artistic creations of its time; some have claimed that it defies description. The director of Cappella Pratensis, Stratton Bull mentioned his interest in the complexities of Renaissance mensural notation and the difficulties that modern-day ensembles sometimes experience in interpreting it. Although several recordings of this Mass already existed, few if any had succeeded in doing justice to its subtle system of mensuration signs and use of notation generally. A symposium was held in 2018 and the resulting performance duly took place, but plans for a recording were postponed due to the Covid-19 pandemic. This had the welcome if unintended consequence of permitting several other live performances before the recording sessions in September 2022: the interpretation that Cappella Pratensis commits to disc is well ‘lived in’. Jacob Obrecht was born in Ghent between 1457 and 1459. His career included a string of posts as choirmaster in Northern France and the Low Countries (Cambrai, Bruges, Bergen op Zoom, Antwerp). He died in Ferrara (of plague) in May or June 1505. It is not known when the Missa Maria zart was composed but there are good reasons for thinking it one of Obrecht’s very last Mass cycles. Even by Obrecht’s standards Maria zart is unusually complex and inventive. Given the general agreement that Maria zart was probably commissioned for the Imperial court at Innsbruck, Cappella Pratensis uses the Germanic pronunciation that would have been in use there.

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