 C.P.E. Bach (1714-1788), dont, d’après Gilles Cantagrel, Bach le Père disait : « C'est du bleu de Prusse, ça se décolore ! », connaît actuellement un très justifié regain d’intérêt. Mozart n’en disait-il d’ailleurs pas : « Il est le père ; nous sommes les enfants ». François Chaplin, Mikhaïl Pletnev, Marc-André Hamelin entre autres l’ont placé sous la lumière des projecteurs de leur art. Il ne faudrait cependant pas oublier Michael Rische qui a entrepris, entre autres, d’édifier une très remarquable intégrale des 53 Concertos pour clavier et orchestre de ce compositeur. Il nous en livre ici le 7e volume, avec trois œuvres s’échelonnant de 1739, 1741 à 1753, particulièrement représentatives de l’expressivité et du style passionné de l’Empfindsamkeit, qui, bien plus qu’un banal sentimentalisme, intensifie le caractère volatile des humeurs comme en témoignent les œuvres enregistrées ici. C.P.E. Bach souhaitait que sa musique touche le cœur : la liberté dans le rythme, les brusques changements de tempo (Allegro du Concerto en La majeur), les interruptions de phrases par des silences (Arioso du Concerto en Ut Mineur et Adagio du Concerto en si mineur), de fréquents chromatismes, des dissonances dans l'harmonie (Allegro spirituoso du Concerto en Ut mineur, Allegro di molto du Concerto en Si mineur), tous ces effets de timbre et d’oppositions dynamiques participent de cette volonté et sont parfaitement rendus ici par les interprétations vivantes de Michael Rische, qui ajoute à l’occasion ses propres cadences, soutenu par le brillant ensemble des Berliner Barock Solisten, dans une prise de son superlativement précise. À thésauriser avec l’ensemble des volumes précédemment parus. (Jacques-Philippe Saint-Gerand)

|