 Les deux compositeurs réunis ici diffèrent en tous points : par l'époque, le style, et la place qu'ils occupent dans le "panthéon musical". Si Balbastre fut réputé en son temps, l'intérêt de sa musique pour orgue paraît aujourd'hui davantage d’ordre musicologique qu’artistique au sens fort du terme. Imprégnée de l'atmosphère des salons de l'Ancien Régime finissant, elle reste, sur le plan mélodique et harmonique, facile, voire superficielle : ses Noëls sont loin d'avoir l'ingéniosité naïve et le charme de ceux d'un Dandrieu (plage 10). La conversion aux pièces de circonstance spectaculaires sur le plan sonore qui - 1789 oblige - permirent au compositeur de ne pas s'aliéner le nouveau régime (variation sur la Marseillaise, Ça Ira, Canonnade) et contribuèrent à sauver dans certains cas des instruments dont les tuyaux attisaient les convoitises de l'armée semble procéder d'un "recyclage" des procédés antérieurs : "sonneries" procédant par notes répétées, déroulements de gammes, échos et répétitions (plages 1, 6,12). Si Balbastre annonce un futur, c'est plutôt celui de Lefébure Wely. Dommage que l'œuvre de Boëly, ne représente que 16 minutes du CD. Elle est à tous égards plus intéressante, et anticipe parfois, au-delà même du romantisme, Franck, Widor ou Vierne. Les qualités de l'interprète, son enthousiasme et sa verve ne font, d'un bout à l'autre, aucun doute dans ce premier CD. Il défend avec brio et conviction un programme qu'on aurait peut-être souhaité plus "équilibré" ou varié. (Bertrand Abraham)

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