Heureusement, parfois les anniversaires ont du bon. A l’occasion des célébrations des cent-vingt ans de la disparition de Benjamin Godard son œuvre refait surface, le disque se l’approprie enfin, quantité d’albums paraissent, musique de chambre, mélodies, musique symphonique, probablement bientôt les opéras dont le fabuleux Dante et Béatrice. Howard Shelley avait devancé ces fêtes, gravant en avril 2013 les deux Concertos de piano et l’Introduction et Allegro. L’occasion de vérifier une fois encore la voix si singulière du jeune-homme dans le concert symphonique française des années 1870-1880. Schumann, le dieu tutélaire de Godard, y parait moins qu’ailleurs dans sa musique symphonique, c’est plutôt un paysage français que Saint-Saëns n’aura pas méprisé qui s’installe entre ce piano et cet orchestre, et fait le discours si saillant, plein de caractères, bouillonnant, épique plus d’une fois, puis soudain d’un pur charme capricieux comme dans le Scherzo du Concerto en la mineur. Admirablement écrits, emmenés avec panache par Shelley dont on espère qu’il se penchera un jour sur les innombrables opus pour piano solo, ces Concertos seront pour beaucoup une révélation (Discophilia - Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé) Contrairement aux autres compositeurs de cette série, comparables à de vieux dinosaures, Benjamin Godard ressemble davantage à un Johnny Depp «daguerréotypé». Nous devrions proposer cet album aux adolescentes. Howard Shelley dirige depuis son piano le Tasmanian Symphony Orchestra dans ce nouveau volet de la série des Concertos romantiques pour piano. Comme toujours, ils nous interprètent une musique inconnue avec un style consommé et une parfaite compréhension, en faisant tout pour défendre ces œuvres. Avec ces pages du compositeur français complètement oublié aujourd'hui, Benjamin Godard, nous atteignons le volume 63. Jeremy Nicholas décrit dans ses notes explicatives Godard comme «un compositeur alliant l’attrait mélodique fleur bleue de Massenet à la fécondité et à l’aisance technique de Saint-Saëns». Parmi les compositions de Godard, plus de soixante-dix numéros d'opus sont consacrés au piano seul, des Contes de Perrault, op.6 à la Valse nº 15, op.153. Son Hommage à Chopin est disponible sur l'enregistrement Hyperion CDA67803, interprété par Jonathan Plowright. Une majeure partie de sa musique puise dans le legs de Mendelssohn et de Schumann (son admiration pour ce dernier lui inspira un arrangement pour quatuor à cordes des Kinderszenen, en 1876). Avec l'émergence de compositeurs plus novateurs, le langage conservateur de Godard finit par nuire à sa réputation avant sa mort précoce à Cannes le 10 janvier 1895. Cependant, comme nous le constatons avec les œuvres présentées ici, son écriture pianistique surpasse l'étendue technique de ses deux idoles et rappelle la bravoure exigeante des concertos de Liszt et Rubinstein.
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