 Merveille ! La Sonate de jeunesse de Bartók, emplie de paysages nostalgiques, d’un naturalisme sonore encore teinté de romantisme. Belle idée de l’avoir placée au début de ce double album. On la joue peu, on ne l’enregistre guère, elle fait entrevoir l’autre direction qu’aurait pu prendre le futur auteur du Mandarin merveilleux, resté coulé dans la veine de Dohnanyi, de Weiner, mais l’irrégularité du discours dont s’amuse et joue le brillant archet de Tassilo Probst, le piano si indépendant, et qui a ses solos, magnifié par le jeu versicolore de Maxim Lando, infusent une fantaisie, un gout de l’étrange qui montre de fait une partition en train de basculer d’un monde à l’autre. L’autre monde est aussi celui d’Enesco, avec le folklore sublimé, empli de lautari imaginaires qui font la Troisième Sonate un œuvre si addictive. Probst feule et flute, languide et bouillonnant tour à tour, dans les écrins dansant dont l’entoure le piano par instant ravélien – élégance, art de la suggestion – de Maxim Lando, leur interprétation prend le temps, savourant cette harmonie juste trouble comme il faut. La folie promise par le titre de l’album, on la trouvera dans l’opus 45 de Joseph Achron, sa grande deuxième Sonate, accumulant les difficultés pour le soliste, au point que même Hagai Shaham ne l’a pas enregistrée. Achron s’y débarrasse de son costume de virtuose – il fut en enfant prodige -, composant son œuvre au noir, fabuleuse musique âpre, torturée, parcourue d’une fièvre expressionniste que suspendent quelques épisodes emplis d’une humeur lunatique. Quel « debut album » ! (Discophilia Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)  Ce double CD d’exception ouvre la carrière musicale du jeune violoniste Tassilo Probst qui, accompagné de son ami pianiste Maxim Lando, a décidé de foncer tête baissée et de proposer trois oeuvres exigeantes à plus d’un titre. La sonate posthume de Bartók est une oeuvre rare, en concert comme au disque. Éclipsée par ses grandes soeurs, cette attachante et atypique sonate de jeunesse (le compositeur a vingt-deux ans) est pleine de passions et de références folkloriques. Si elle met en lumière la virtuosité dont est capable le violoniste, elle est également d’une grande profondeur de sentiments (le mouvement central est d’une beauté saisissante). La troisième sonate d’Enescu, un concentré de musique populaire roumaine et de recherches formelles, est brillamment interprétée ; c’est dans cette sonate que la complicité des deux interprètes se fait le plus sentir. Si vous ne connaissez pas encore l’oeuvre d’Enescu, qui fut un des grands violonistes du siècle et un excellent pianiste, précipitezvous ! Enfin, nous avons droit à la deuxième sonate de Joseph Achron (1886-1943), donc c’est ici le premier enregistrement mondial. S’il est difficile de porter la responsabilité d’un premier enregistrement, il semble que cela n’ait en rien entravé l’enthousiasme, la fougue et la passion qu’ils déploient dans cette oeuvre qui déploie un jeu d’ambiances changeantes, tour à tour fantastiques, tendres, mystérieuses ou enflammées. Une sonate à découvrir ! (Walter Appel)

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