 Bartok et Dohnanyi, deux destinées qui n'ont cessé de s'entrecroiser pour aboutir à des évolutions musicales divergentes que le tempérament tourmenté, réservé et introspectif du premier, opposé à la sérénité du second, pouvait laisser prévoir; mais rien de tel n'apparaîtra dans ce cd qui juxtapose le quintette avec piano BB 33 de Bartok, oeuvre de jeunesse (1904) avec celui op. 26 de Dohnanyi (1913-14) qui est peut-être son chef d'oeuvre le plus accompli et mérite d'être classé parmi les plus grands quintettes avec piano de l'histoire du répertoire. Un Bartok donc encore sous l'influence de Brahms, de R. Strauss et de Dohnanyi lui-même, usant de traits 'hongrois' calqués sur la musique 'tzigane' telle qu'on la concevait alors; seules les âpres harmonies de l'adagio permettent d'entrevoir le style à venir du compositeur. Dohnanyi nous propose en revanche une oeuvre au contrepoint complexe, mais parfaitement maîtrisé pour atteindre des sommets expressifs, au sein d'une structure cohérente où les fils du discours se rejoignent dans le moderato final. Paolo Giacometti et le Zemlinsky Quartet font parler ces musiques avec une éloquence et une sensibilité qui ne se contentent pas de nous séduire mais nous bouleversent dans le Dohnanyi. (Michel Lorentz-Alibert)  Immergé dans la puszta de Gerlice, au cours du brulant été de 1903, Le jeune Bela Bartok, 22 ans, compose un vaste quintette pour piano et cordes où s’invitent ses premières musiques populaires, stylisées au long d’un Scherzo où passent encore les effluves d’un Empire qui va mourir. Mais le vaste premier mouvement, empli de paysages, regardait ailleurs déjà, poème de la nature qui n’est pas si éloigné de ceux que composait alors le jeune George Enescu. Le sombre Andante est plus étrange encore, musique raréfiée, nocturne inquiet pénétré des bruissements d’une nature mystérieuse. Paolo Giacometti dans les murmures de cordes des Zemlinsky, en fait entendre la poésie un peu funèbre, avant d’envoler un final où les idiomes populaires éclatent. Le couplage avec le ténébreux Second Quintette de Dohnanyi, condisciple de Bartok au Conservatoire de Budapest, est imparable. A dix ans de distance les deux œuvres semblent se répondre, même gout pour le sombre, même tension, mais la partition splendide de Dohnanyi avoue une maitrise supérieure, le métier remboursant une inspiration moindre. L’œuvre, composée à la césure des années 1913-1914, danse au bord d’un volcan, dans les vapeurs délétères d’une écriture surchargée dont les cinq amis savourent les ambiguïtés tonales, la sensualité morbide, vraie musique d’un Empire en train de sombrer entre ses portées. Disque admirable, qui souligne l’influence certaine que Dohnanyi eut sur les premières œuvres de Bartok, sans masquer la singularité de celles-ci. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)  The disc presents two quintets for piano and string quartet by two distinguished Hungarian composers from the 20th century: Bela Bartook and Ernst von Dohnanyi. While Bartok’s Piano Quintet is an outstanding juvenilia, Dohnanyi’s sophisticated work represents its author at its best.
|