L'un, presque oublié de nos jours, ayant peu fait imprimer ses œuvres, a inauguré le « siècle d'or » de la musique espagnole. L'autre, déjà célèbre de son vivant, est toujours considéré comme le plus grand compositeur de la Renaissance espagnole. L'un, Francisco de Penalosa (1470-1528,) a pu être comparé à Josquin des Prés, qui l’a sans doute influencé. L'autre, Tomas Luis de Victoria (1548-1614) a bénéficié à Rome de l'enseignement de Palestrina, alors compositeur « officiel » de l'Eglise de la Contre-Réforme. Mais ils ont bien des traits communs : Leur attachement à l'Espagne, qu'ils rejoindront malgré des opportunités de carrière en Italie ; à leur roi ; à la foi catholique, à laquelle ils consacreront – pour Penalosa – une grande partie de l'oeuvre, et, pour Victoria, la totalité. Et aussi un certain conservatisme esthétique, comme en témoigne l'importance qu'ils donnent au cantus firmus issu de la monodie grégorienne, sur lequel ils construisent bon nombre de leurs œuvres, tout en y ajoutant leur touche personnelle, autochtone. Par exemple, dans le motet « Ave Regina Caelorum », un de ses sept motets mariaux, Penalosa réussit à dégager une formidable expressivité malgré les contraintes du cantus firmus. Si Penalosa était passionné de jeux contrapuntiques et de canons, Victoria, deux générations plus tard, pousse à l'extrême la couleur harmonique dans ses messes, comme la « Missa O Magnum Mysterium » à quatre voix, messe « parodie », c'est à dire construite sur un motet pareillement intitulé, un des plus célèbres de ces motets qui ont fait sa réputation, composé sur une pièce grégorienne issue des matines de Noël. Victoria est dans la recherche constante de la perfection, de la musique mise au service du texte, des phrases claires et bien définies, dans une rhétorique de la persuasion. Remercions le Penalosa Ensemble de faire sortir de l'oubli, et de fort belle manière, pleine de grandeur et de sérénité, les chefs-d'oeuvre de leur compositeur éponyme, et de nous donner par surcroît des morceaux rarement joués de Victoria, un des plus grands compositeurs de musique sacrée de son temps. (Marc Galand) On the present recording the Peñalosa Ensemble brings together works by the two composers whose sacred music forms the chronological frame of the Golden Age of Iberian vocal music: its namesake, the Spanish Renaissance composer Francisco de Peñalosa (motets, Magnificat), and Tomás Luis de Victoria (Missa, motets). If Peñalosa may be said to belong to the first generation of composers who assimilated the Franco-Flemish style of Josquin Desprez, then Victoria’s death in 1611 symbolically closed the Iberian Renaissance through the adoption of Italian influences from the Age of Mannerism. The unique, highly emotional manifestation of Iberian Marian piety also influenced both composers – just as it also left its imprint on the visual arts in Spain during the sixteenth and seventeenth centuries. Compositions by Tomás Luis de Victoria not only experienced successful, rapid, and continuous dissemination over the whole of Europe owing to what was beyond any doubt their sublime quality but also received additional impetus from printed editions of music – so that his music was interpreted without interruption until the nineteenth century and was elevated to the status of a symbol standing for an entire musical epoch.
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