 « Momente » fut composée par parties par Karlheinz Stockhauzen entre 1962 et 1969. Comme son nom l'indique, l'œuvre travaille sur le concept de temps mais aussi d'espace, à travers un matériau musical ambitieux, selon un modèle que Stockhausen a baptisé du terme de Momentform. L'auditeur est plongé à la fois dans l'instant présent, mais aussi dans « l'éternité qui ne commence pas à la fin des temps mais peut-être appréhendée à chaque instant » (Stockhausen). Il existe une source littéraire composée d'extraits de lettres (de la dédicataire de l'œuvre Mary Bauermeister), de citations (William Blake), et du Cantique des Cantique. L'œuvre exige un effectif nombreux et assez élaboré : une soprano soliste, 4 groupes choraux, (trois par pupitres) chaque chœurs opérant avec diverses percussions, 13 instruments : trompettes, trombones, deux orgues (dont un Hammond), tam-tam. Chaque instrument ou groupe d'instrument, voix soliste ou groupe de voix, a un rôle défini et participe à cette procédure au même titre que les thèmes, motifs et structures formelles. « Momente » est constituée de trente sections (moments) arrangées en séquences bien spécifiques. Chaque moment recoupe une ou plusieurs notions : le M moment : mélodique (monodie / hétérophonie), le K moment comme Klang (le son, la voix), homophonie, enfin le D moment : durée, polyphonie, aléatoire. Durant l'exécution, ces moments se succèdent, se recoupent, s'interchangent selon un ordre (ou un désordre) dûment organisé à l'instar d'un ouvrage architectural. Ajouté à cela, de brefs interludes simulent l'intervention du public (applaudissements, chuchotements, onomatopées, toux). Ils complètent et confondent le climax ambiant, interpellant les deux types d'écoute de l'auditeur (distinction que fait Stockhausen): psychologique (Erlebnisdaueur) et objective (Uhrzeitdaueur) provoquant ainsi sur l'auditeur transi, un effet quasi « expressionniste ». A voir l'extraordinaire graphie de la partition (extraits reproduits dans la notice), ainsi que les schémas de la mise en espace des différentes sections, on situe la complexité organique de l'ensemble et la grande difficulté de l'interpréter, d'en restituer l'ampleur et l'impact. Exegi monumentum aere perennius, ce CD Wergo reste le seul enregistrement historique de la version de 1965, dirigé par le compositeur en 1967. Participation très engagée du chœur de Köln, des frères Kontarsky et de la soprano Martina Arroyo. Prise de son claire (espace bien défini) mais un peu massive (timbres et couleurs sacrifiés). Expérience à vivre plutôt en concert, in media res, cette œuvre de Stockhausen fut donnée à l'occasion des 70 ans du compositeur, sous la direction de Stockhausen, à la Cité de la Musique. (Jérôme Angouillant)  As early as the 1960s WERGO made a name for themselves as a contemporary music label with outstanding recordings released under the title of “studio reihe neuer musik”. Now WERGO releases these gems from their early years, these highlights of 20th-century music history, in an excellent sound quality on CD for the first time. “studio reihe” now continues with a work by Karlheinz Stockhausen : His “MOMENTE” [Moments] for soprano, four choral groups, and thirteen instrumentalists have not been designed as a fixed work with a clearly defined beginning, formal structure, and ending but as a composition of independent events with multiple meanings: For example, the individual groups of moments should be combined for certain performances of the work in such a way that they form their own version – in accordance with the given duration of programme and sound means. As soon as the arrangement of the moments has been determined and the performance material been set accordingly, certain moments are to be "inserted" in their neighbouring moments as well, to “remember” earlier ones or “announce” moments still to come. Premiered on 21 May 1962, the composition underwent some changes in the following years which led to several variants, with this CD presenting "Version 1965".

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