Sigfrid Karg-Elert Œuvres pour orgue harmonium et piano Stockmeier Michel Jacobs Breidenbach Zieschang

Né en 1877 le compositeur pianiste et organiste Sifrid Karg Elert étudie le piano au conservatoire de Leipzig auprès d'un élève de Liszt et la composition avec Reinecke. Encouragé par Grieg, il commence à composer pour le piano puis découvrant l'harmonium avec l'éditeur berlinois Carl Simon et l'organiste Paul Homeyer il va produire un imposant corpus pour cet instrument tout en retournant aux tribunes de l'orgue. En 1919 il succède à Max Reger en tant que professeur à Leipzig. Il donne de nombreux récitals d'harmonium avant de débuter une série de concerts aux États-Unis au printemps 1932 qui tournera au fiasco en raison de sa santé défaillante. Il décède en 1933 à Leipzig. Gorgé de polyphonie (Bach) et d'extrapolations harmoniques (Reger), son style, représentatif du post romantisme germanique doit concomitamment aux influences de Debussy, Grieg et de Scriabine. Sa musique (comme celle de nombre de ses contemporains) repousse les limites de l'harmonie traditionnelle sans perdre sa cohérence tonale. Ce coffret de 18 CD comprend l'intégralité de ses œuvres pour clavier. La partie consacrée à l'orgue est dévolue à Wolfgang Stockmeier auteur d'une ancienne intégrale Bach de haute volée (Membran en mono), le corpus d'harmonium est partagé avec un accordéon ! (CD13) et l'ensemble de pièces pour piano comprend quelques duos. Une telle somme fait côtoyer lingots d'or et ferraille. Tout n'est pas de la même urgence esthétique. Les œuvres d'orgue illustrent la prégnance de l'héritage de Bach et la proximité avec Reger. Un merveilleux exemple d'orgue polyphonique et contrapuntique, noble, riche en nuances et en couleurs. Coté harmonium, les dreiunddressig portraits Op.101, hommages aux musiciens baroques (Haendel, Rameau, Couperin) et romantiques (Schubert, Chopin), les paraphrases d'après des opéras de Wagner alla Liszt, plus quelques Sonatines à valeur pédagogique sont joués sur deux fabuleux instruments au son fruité et velouté comme un bordeaux millésimé (Signés Victor Mustel 1913 et Johannes Tiz 1912). Évoquons la très riche collection de pièces pour piano à la fois d'une grande liberté d'écriture et d'une formidable puissance d'évocation que l'on ne peut hélas détailler ici faute de place. Sans oublier aussi les Sonates pour orgue qui renvoient à Rheinberger, les fulminantes Improvisations et Symphonie sur des chorals et la monumentale Symphonie Op 143 qui fait presque figure de testament. Les curieux pourront enfin consulter la passionnante notice qui contextualise chaque partition. Indispensable pour re/découvrir ce remarquable portrait d'un grand oublié de l'histoire de la musique. Enfin pas tout à fait. La preuve par CPO ! (Jérôme Angouillant)