Au rayon Sonate chez Rachmaninov, les élans de la Deuxième auront fait oublier le sombre poème pianistique de la Première. Attention, chef d’œuvre ! Steven Osborne se garde bien, comme tant d’autres de la brusquer, il conduit au long des trois mouvements un voyage dans cette fresque dont le sous texte s’abreuve au Second Faust de Goethe, une vaste réflexion quasi philosophique, donnant toute leur ampleur aux climax dramatiques sans jamais saturer l’espressivo par la surabondance du son, détaillant les nombreux replis lyrique qui confèrent à l’ensemble sa couleur nostalgique derrière l’éloquence. Admirable proposition, à l’égal de celle de Moments musicaux délivrés de tout pathos, d’une fluidité dans l’Andantino qui tient du rêve. Tout le cycle sous ses doigts est simplement prodigieux, émouvant jusque dans l’exaltation du Maestoso, peu de pianistes auront si bien compris les arrières plans, la lyrique, le raffinement de ce cycle majeur auquel Steven Osborne offre un sublime prélude : la transcription signée par le compositeur de l’onirique Nunc dimitis des Vêpres. Au centre de l’album trois raretés ; un sombre Prélude posthume, et deux brèves pièces qui rappelle que poco a poco, Steven Osborne discrètement assemble le cycle Rachmaninov majeur de ce début de XXIe siècle. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé) Cette nouveauté ressemble à l’achèvement d’une intégrale du piano de Rachmaninov. Steven Osborne s’était déjà fait remarquer par de belles intégrales des Préludes, des Etudes-Tableaux, de l’imposante 2ème sonate. Un jeu puissant, poétique, excellement enregistré. La première sonate en ré mineur est rare au concert comme au disque : datant de 1907, plusieurs fois remaniée par le compositeur lui-même, qui s’inspire du mythe de Faust, l’œuvre est finalement créée en 1908. Elle ne trouvera jamais la faveur des grands interprètes, qui lui préfèrent la 2ème sonate. D’autres raretés figurent sur ce disque, comme la série de Moments musicaux, où Rachmaninov regarde encore du côté du romantisme finissant. La notoriété du pianiste écossais Steven Osborne, 51 ans, reste étonnamment limitée sur le Continent, alors qu’il construit depuis plus de vingt ans une impressionnante discographie chez le label britannique Hyperion. Est-ce dû au fait qu’Osborne n’appartient pas à la catégorie des broyeurs de clavier, des virtuoses ébouriffants ? Très bien enregistré – c’est une spécialité d’Hyperion – son piano ne connaît aucune limite technique, mais se refuse à des épanchements excessifs, finalement dans la lignée du compositeur lui-même. Un Rachmaninov qui sort des sentiers battus et rebattus, un interprète de tout premier rang. (Jean-Pierre Rousseau)
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