 Quel est le fil conducteur de cet album ? On peine à discerner ce qui y rassemble ces compositeurs. Ni le siècle, ni la nation, ni la confession, ni surtout ce qui les unirait, selon la présentation de cet album : la nécessité pour chacun de dissimuler son identité pour composer. Certes, Elisabeth Jacquet de la Guerre (1655 -Paris), née et choyée dans une famille musicienne, était femme dans un milieu surtout masculin, mais elle a été admirée et protégée par Louis XIV comme par le Régent. Richard Dering (1580-1630), né protestant, s'est converti au catholicisme au cours d'un voyage en Italie, ce qui ne l'empêcha pas de revenir en Angleterre et d'y achever paisiblement ses jours. Salomone Rossi (1580-1630) était juif, mais fêté à la cour de Mantoue, ami de Monteverdi, Gastoldi, Viadana, il fut dispensé de porter la rouelle imposée à ses coreligionnaires. Leonora Duarte (1610-1678) est bien née d'une famille juive d'origine portugaise forcée de se convertir et d 'émigrer par la redoutable Inquisition portugaise. Mais elle s'est épanouie comme femme, citoyenne, musicienne dans la métropole néerlandaise. Alfonso Ferrabosco l'Ancien (1543-1588), issu d'une famille aristocratique bolognaise, introduisit le madrigal en Angleterre. La reine Elisabeth a favorisé l'éducation de son fils Alfonso Rerrabosco II, peut-être en échange de quelques services d'espionnage...William Byrd (1538-1623), resté catholique dans le royaume anglican, a joui de privilèges de la part de la même Elisabeth, et a formé tous les musiciens anglais de la génération suivante. Quant au Catalan d'origine française Enric (Enrrique) de Paris (documenté dans les années 1460), attaché à la cour des Aragon, on sait si peu de lui qu'on ne saurait affirmer qu'il dut abjurer son supposé judaïsme. Mais laissons de côté cette présentation au vague parfum « woke » hors de propos et écoutons la musique : elle est belle, elle est joliment interprétée. Beaucoup de morceaux sont inédits au disque, et il est émouvant (mais non inédit) d'entendre chanter en hébreu, sur la musique de Salomone Rossi, le psaume 80 Elohim Hashivenu (Marc Galand)  Passing Fancy: Beauty in a Moment of Chaos, the AVIE debut by leading New York City early music ensemble Sonnambula, traverses music by several Renaissance composers who were forced to conceal their identities for social, religious or ethnic reasons. Yet their music transcended the disorder surrounding them, flourishing in the intersection of beliefs and styles. Disruption and displacement wasn’t uncommon in 16th-and 17th-centuries Europe. During the Reformation, creative individuals, including composers, were often forced to conceal their identities – for reasons social, religious, ethnic, racial or otherwise. Yet despite – or perhaps due to – the disorder, musical styles and forms flourished, earning the era it’s Renaissance designation and thus creating “Beauty in a Moment of Chaos”. Sonnambula, an ensemble of New York City-based early music luminaries, bestow beauty on their AVIE debut, traversing an aural intersection of beliefs with northern and southern European styles. Here is the beauty of William Byrd and Richard Dering, two Catholics composing in Protestant England; of Leonora Duarte, a Portuguese-Jewish woman forced to live as a converso (“New Christian”), in Antwerp, and Parisian Elisabeth Jacquet de La Guerre, whose lost works have re-emerged with a vengeance in our own time; of the Bolognese Alfonso Ferrabosco the elder who emigrated to England, and Salomone Rossi who unusually set Hebrew texts to Western-style polyphony from his relatively tolerant position in the court of Mantua. The release of Passing Fancy: Beauty in a Moment of Chaos coincides with Sonnambula’s taking up residency at New York City’s newly-renovated premiere museum, The Frick Collection.

|