 Un monde sépare le Premier Concerto pour flûte, tout allègre, avec son néo-classicisme heureux, ses persifflages entre Prokofiev et Chostakovitch, son largo recueilli et son magnifique finale commencé par un thème juif qu’énonce le violon, et le grand geste lyrique du Second où la flûte se prend pour un violon. Des deux lequel est le chef d’œuvre ? Du Premier Alexander Korneyev et Rudolf Barshai avaient offert une version acérée que je croyais bien indépassable, Lukas Dlugosz et Robert Kabara en propose une lecture plus heureuse, plus légère, substituant aux acidités un giocoso bien vu. Mais le chef-d’œuvre, c’est bien le Second Concerto, merveille lyrique écrite au soir de sa vie (1987) alors que son art s’était libéré de l’omniprésence de Chostakovitch. Il en existe peu de versions, depuis que Anders Jonhäll et Thord Sevdlund l’on gravé en première mondiale pour Chandos en 2005. La nouvelle venue surclasse même l’exemplaire lecture d’Antonina Styczen et de Wojciech Rajski (Tacet) par une fantaisie un peu lunaire, les sonorités profondes du traverso de Lukasz Dlugosz se mirant dans l’écrin de cordes dont la direction subtile de Robert Kabara l’entoure. Le chef réussit également la difficile 7e Symphonie, écrite pour Rudolf Barshai. Weinberg l’ouvre par un solo de clavecin, avant de déployer ce qui en fait une sérénade pour cordes en six mouvements, musique entre chien et loup, où j’entends des échos à la lyrique de Benjamin Britten que Moscou découvrait alors au début des années soixante. Et si maintenant Robert Kabara et sa belle formation s’attelaient aux Sinfoniettas, aux Symphonies de chambre ? (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)  L’œuvre de Weinberg prend sa source dans diverses esthétiques musicales du 20e siècle : tonalité, atonalité, polytonalité, exubérance, épure, musique pure et influences du folklore avec une place centrale de la culture juive. Celle-ci n’est pas simplement une inspiration, mais l’essence même de son art. Weinberg subit les drames de son temps et sa musique exprime de manière unique les errances d’un homme qui se considérait comme un grand témoin. Achevé en 1961, le Premier Concerto pour flûte évoque de manière stupéfiante le thème et la texture instrumentale du Premier Concerto pour piano de Chostakovitch. Les lignes mélodiques paraissent tournoyer sur elles-mêmes dans une danse continue. La flûte de Lukasz Dlugosz respire avec beaucoup de simplicité et de gravité à la fois dans le magnifique mouvement lent alors que les motifs empruntés à la musique klezmer colorent le finale. Le soliste est tout aussi à son aise dans le Second Concerto pour flûte de 1987. Le caractère nostalgique et mystérieux de l’œuvre est d’autant mieux souligné que les cordes de l’orchestre possèdent une belle pâte sonore. Enrichie du clavecin, la Symphonie pour cordes n° 7 rend hommage au concerto grosso classique. A l’étude des timbres s’associe une écriture, aux cordes, postromantique. Curieuse partition, parfois minimaliste et, pourtant, d’une veine lyrique constante. (Jean Dandrésy)

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