 L’encre de l’Eroica de Beethoven était à peine sèche, Haydn entrait dans sa 72ème année et revenait pour la dernière fois à son cher quatuor à cordes. Deux mouvements seulement, les forces lui manquant pour compléter cet opus 103 où sous un verni classique il semble justement s’adresser à Beethoven. Les Takacs le jouent avec toutes les subtilités nécessaires, le plaçant à la fin de leur album qui herborise sur une grande part du spectre des Quatuors. Si leur lecture de l’op. 42 est modeste, les deux Quatuors pour Lobkowitz les montrent inspirés, jouant alerte, savourant la science harmonique et la virtuosité polyphonique où Haydn semble se faire l’écho des Quatuors prussiens de Mozart. La plénitude de leur jeu magnifie ce diptyque de la maturité, Edward Dusinberre se régalant du petit concerto que lui destine Haydn dans l’Adagio du Quatuor en sol majeur. Je crois bien ne l’avoir jamais entendu ainsi, détaillé avec tant d’art. Et si demain les Takacs s’éloignaient des cahiers de la maturité pour tenter les Sonnen-Quartet ? (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)  Créé en 1975, le quatuor Takacs remporta le premier prix du Concours International d'Evian en 1977. Connus des mélomanes pour avoir effectué ses premières gravures tout d'abord sous le label officiel de leur pays, Hungaroton, les Takacs enregistrèrement, dès 1988, pour Decca et aujourd’hui pour le label anglais Hyperion. Les membres ont changé à l’exception du violoncelliste Andras Fejer. En revanche, l’ensemble a préservé une sonorité typée, un certain grain sur les cordes, une rondeur de timbres qui fait merveille dans le répertoire classique et romantique austro-hongrois. Ils "habitent" cette musique avec une intensité peu commune. L’opus 42, dans son apparente "simplicité" se révèle avec une puissance incantatoire dans le finale. La netteté des attaques, la clarté de la polyphonie sont soutenues par une captation très proche et définie. En 1799, soit quatorze ans après l’opus 42, les deux quatuors op. 77 sont d’une veine autrement plus ambitieuse. Les Takacs jouent admirablement de l’ambiguité d’une musique qui puise son inspiration aussi bien dans les ländlers et chants paysans que dans une sophistication de l’écriture annonciatrice du corpus beethovénien. Les Takacs ne cherchent nullement à surligner tout ce que cette musique compte de trouvailles, de géniales inspirations : elles vont de soi, fusionnant entre le populaire et le savant. L’exubérance de ces pages trouve ici des maîtres comme il y en a peu dans l’interprétation de cet univers fondateur du quatuor moderne. Les deux seuls mouvements de son ultime quatuor, opus 103, composé en 1804, saisissent l’auditeur par leur force expressive. (Jean Dandrésy)

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