 Wagenseil jouit, ces toutes dernières années, des faveurs du disque : après, notamment, la parution en première mondiale de ses sonates pour violon, violoncelle et violone par la Musica Elegentia, l’ensemble Klingekunst qui, parmi des concertos pour flûte représentatifs de la musique viennoise du XVIIIe siècle, avait déjà mis à l’honneur ce compositeur célèbre en son temps, consacre ce Cd à 7 de ses sonates en trio pour flûte, violon et basse. Si ces œuvres courtes obéissent au schéma traditionnel rapide-lent-rapide, elles se signalent avant tout par l’extraordinaire richesse de leurs qualités expressives. Tout -tonalité, rythme, sonorité, harmonie, dynamique, contrastes, articulation, couleur instrumentale- est mis ici au service de la traduction de l’affect. Et chez Wagenseil, la gamme des affects est immense car chacun d’eux (ainsi la joie multiple dans le trio n° 9) connait des paliers, des seuils d’intensité, des densités, des nuances et des qualités qui illustrent à merveille la complexité subtile de l’univers de l’Empfindsamkeit, terme imparfaitement rendu par le mot français « sensibilité » au sens qu’il a au XVIIIe siècle . Cette musique de chambre, galante au vrai sens du terme c’est-à-dire renvoyant à une esthétique et même à un ethos, n’a rien d’artificiel, ni de superficiel. Elle incarne un art intimiste accompli de la miniature, produit par un travail d’orfèvre exigeant : ces sonates sont de petits joyaux dans lesquels chaque ciselure, chaque détail est comme nécessité et contribue à la dilection de l’auditeur. Il y a là un sens prodigieux du dialogue musical, une kadéiloscopie des contrastes à travers lesquels se dessine - notamment entre mouvements rapides et mouvements lents - une fine dramaturgie (sonate 17), par exemple. L’interprétation est elle-même par sa précision, son allant, son aisance, sa fraîcheur, un total accomplissement. (Bertrand Abraham)  The present trio sonatas for transverse flute, violin and basso continuo by Christoph Georg Wagenseil, who was one of the most famous Viennese composers of his time, are all conceived in three movements according to the usual sonata scheme of fast - slow - fast, but they are by no means musical "mass-produced goods", since the music of the 17th and 18th centuries was, without exception, committed to the musical imitation of the so-called "affects", whereby this term was understood to mean any human emotion. This imitation of affect was considered the highest goal of composition in those days. As means for this imitation, the composer had all the parameters of composition at his disposal, such as style, genre or form, key, melody, rhythm, tempo, meter, harmony, dynamics, articulation and instrumentation, whereby he should always choose such means and their combinations that best corresponded to the intended affect. The Ensemble Klingekunst interprets these trio sonata jewels - all first recordings, by the way - expressively and passionately.

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