 Curieuse destinée que celle de Schreker, musicien juif autrichien, né à Monaco et mort à Berlin en 1934. Son œuvre emploie avec bonheur les styles les plus divers. En toute logique, Franz Schreker fit partie de la liste promulguée par le IIIe Reich, celle des musiciens bannis de l’Entartete Musik, c’est-à-dire de la "musique dégénérée". Humoristiquement, il avait réalisé son autoportrait en collant des critiques de journaux parues sur son œuvre : "Je suis un impressionniste, un expressionniste, un cosmopolite, un futuriste et un vériste, mais aussi un juif qui a fait carrière grâce au soutien des juifs. Ce qui ne m'empêche pas aussi d'être un bon chrétien, poussé en avant par la clique catholique. En tant que musicien, j'ai la mélodie dans le sang quoique mes harmonies soient plutôt anémiques. Je confesse être un grand pervers qui exerce une influence néfaste sur le peuple allemand […]". Son ballet-pantomime "L’Anniversaire de l’Infante" inspiré du conte d’Oscar Wilde ("The Birthday of the Infanta") fut une commande de la Wiener Secession, courant éphémère fondé par Gustav Klimt. La légèreté de l’œuvre frisant parfois l’opérette est renforcée par le fait qu’il s’agissait, à l’origine, d’une musique pour orchestre de chambre. Jürgen Bruns en extrait avec bonheur la sève raffinée et des effets de timbres subtils. Dans cet album, l’auditeur découvre la musique de Ernst Toch qui se définissait lui-même ainsi : "Je suis le compositeur le plus oublié du XXe siècle". Juif, il s’installa aux Etats-Unis, travaillant notamment pour le septième art, à Hollywood. Sa Tanz-Suite de 1923 fourmille de mille détails sonoristes, élégante musique si délicate et interprétée dans un esprit chambriste parfait. (Jean Dandrésy)  Der Geburstag der Infantin (L’anniversaire de l’Infante), un ballet/ pantomime basé sur une nouvelle de Oscar Wilde, a été le premier grand succès public de Franz Schreker. Ecrite en 10 jours en 1908, Der Geburstag a été la pièce centrale d’un Gesamtkunstwerk préparé par le peintre Gustav Klimt pour l’ouverture du Kunstschau Wien. Si le ballet a été écrit pour un orchestre à cordes, la Suite que Schreker en a tirée en 1923 a été conçue pour un grand orchestre. Une partition luxuriante, pleine de superbes mélodies et harmonies exquises, Der Geburtstag der Infantin est une des œuvres les plus séduisantes du 20e siècle ayant subie la répression du régime Nazi. La Suite de Danse, op. 30 de Ernst Toch a été composée en 1923 pour la classe de danse de la chorégraphe Frieda Ursula Back à l’Académie de Musique de Mannheim, où Toch enseignait la composition depuis 1912. Constituée à l’origine de quatre mouvements et développée par la suite à six, l’œuvre à été conçue autour d’un poème dansant de la même Frieda Ursula Back, ancienne élève de Mary Wigman, intitulée «La forêt ». Tout sauf musique fonctionnelle, la Tanz-Suite, op. 30 est une des œuvres qui ont établi la réputation de Toch dans les années 1920.

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