Joseph Haydn (1732-1809)
Symphonie n° 95 en do mineur, Hob. I: 95

Frank Martin (1890-1974)
Concerto pour 7 instruments à vent, timpani, percussion et orchestre à cordes

Igor Stravinski (1882-1971)
Suite "L'Oiseau de feu"

Symphonie-Orchester des Bayerischen Rundfunks
Ernest Ansermet, direction

Un bémol : la captation de la Radio bavaroise choisi une prise de son très "dans la salle" capturant l’écho global de l’orchestre, plutôt que sa sève. Péché véniel, mais pour l’art d’Ansermet, si finement accordé aux détails par la battue même -qui laisse de l’espace- quasi mortel. Dommage pour la 95e de Haydn, si parfaitement emmenée, où cette vertu cardinale du Grand Suisse (et de Haydn itou), l’humour, se perd un peu dans la générosité de l’Herkulessal, mais pas le brio, l’allant, le geste athlétique, lancé, qu’il avait toujours chez les classiques viennois et dont on sent les bavarois un peu surpris. C’est qu’il aura d’abord répété pour ces concerts de mai 1962 la périlleux Concerto à sept de Frank Martin : heureusement les micros sont placés cette fois ad hoc, faisant entendre comment les souffleurs bavarois s’en acquittent avec les honneurs, Ansermet réglant en funambule également le swing et la poésie, distillant le quolibet et l’étrange d’un même geste : l’Adagietto est littéralement de la musique d’Ariel, un songe sur un fil tendu sur un précipice. Formidable évidemment la Suite de "L’Oiseau de feu", si peu suite tellement pantomime, qui s’en étonnera ? (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)

Ce concert munichois de 1962, capté dans une monophonie des plus correctes associe des partitions pour le moins éloignées les unes des autres. Pour autant, le chef suisse nous convie à un voyage dans le temps, témoignant d’une saisissante évolution de l’écriture orchestrale. La Symphonie en ut mineur de Haydn brille avec une belle tension, un sens des couleurs, sans épaisseur et avec peu de vibrato. La clarté s’impose aussi bien dans les pas de danse du Menuetto que dans la fraîcheur énergique du finale. Le chef suisse était lié avec Martin et Stravinski et il dirigea la création de certaines de leurs œuvres. De son compatriote, Frank Martin, Ansermet grava plusieurs œuvres dont ce concerto avec la Suisse Romande, en 1961, pour Decca. Les pupitres des vents du RSO de Bavière scintillent avec une extraordinaire vivacité. L’ironie, le sarcasme, une certaine bonhomie, aussi, sont de mise dans cette partition qui rend hommage à l’esprit du concerto grosso. On apprécie d’autant plus le charme des couleurs diaphanes du mouvement lent conçu dans le rythme d’un immuable balancement. On se régale des timbres de chaque instrument, d’une géniale trompette solo, notamment. Ansermet grava à plusieurs reprises l’ "Oiseau de feu" de Stravinski. Dès l’introduction, il trouve le climat juste, le dosage idéal des dynamiques et des contrastes. L’âpreté et la violence expressive dont est capable l’orchestre servent magnifiquement une interprétation aussi pointilliste. Un très beau concert. (Jean Dandrésy)