 Gagarine en vol orbital, le divorce de madame Bardot (et cette pub scandaleuse d'eau minérale, Bébé aime Charrier), le général s'écriant "Sdravouiet Russia" en se prenant pour Henri Tisot, fi les lilliputiennes contingences ! Sachant que dans les années soixante de notre adolescence repliée, rien n'égalera jamais la révélation étreignante par l'immense Eric Heidsieck du piano de Fauré (ces "long playing" qu'il fallait fatalement commander, au bout d'un mois on revenait aux nouvelles). Cela marque pour la vie ou alors, la zizique, que c'est pas la peine. Et c'est encore demain que nous lui garderons une gratitude éperdue, doublée d'une admiration que révolte d'autant plus cette indifférence même polie pour pareil maître de notre si oublieuse criticaillerie nationale, suivez mon regard qui foudroie. Loin au Japon, loin du cœur ? On le voit ici retrouver le Bach de ses anciens enregistrements Cassiopée, toujours dans ce naturel nu comme un ver qui coule de source, laquelle est divine d'être trop humaine. En toute simplicité, comme on se retrouvait autrefois chez les parents d'un copain après l'école : tu réclamais Jean-Sébastien, il descend, le voici. Des préludes et fugues tournant autour du fa comme l'abeille autour de son pot de confiture, des suites montées en joaillerie, et entre les deux, de délicieuses variations beethovéniennes, tour de passe-passe à la fin, bref tourbillon et mains derrière. Et nunc plaudite, car pour cette partie de l'enregistrement, nous sommes en public et l'on entend le maître présenter oralement l'œuvre. Intervention qu'on aurait pu plager bien séparément, pour pouvoir la déprogrammer à chaque réécoute du disque. Lequel, en outre, dépasse à peine les cinquante minutes, alors tout de même. Deux fois au coin et pardon, monsieur Heidsieck ! (Gilles-Daniel Percet)  Eric Heidsieck a une carrière discographique impessionnante. Fatigué de l’ambiance «studio» il a enregistré en deux fois un premier disque au siège de Polymnie préférant une ambiance feutrée sans contrainte d’horaires et d’utilisation des lieux à un espace dédié. Nous le retrouvons ici avec un vif intérêt dans la suite de sa vision des Préludes et Fugues du Clavecin bien Tempéré ( POL 109 117 ) si proche nous semble-t-il de la pensée du Maître. Ilcomplète cet enregistrement avec deux des Suite Françaises et les Six Variations Op. 34 de Beethoven, enregistrées au Japon en 2007. Eric Heidsieck signe ainsi son 101ème disque !
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