 Longtemps considéré au siècle dernier comme un machiavélique fabricant d'exercices destinés à torturer les apprentis-pianistes, Czerny reprend peu à peu sa juste place au panthéon des compositeurs majeurs du début du XIXème siècle. Enfant prodige, son père Wenzel lui enseigne le piano dès l'âge de 3 ans, il enseigne dès qu'il en a 15. Elève de Salieri, Beethoven et Hummel, il joue dès sa jeunesse Bach, Mozart, Haydn et Clementi. Doué d'une excellente mémoire, il jouera souvent de tête les sonates de Beethoven, son principal professeur, organisant une rencontre entre le maître et son élève le plus connu, Franz Liszt, alors âgé de 11 ans, en 1823. Auteur d'une production musicale ahurissante (861 opus publiés, sans compter de très nombreux inédits), il a écrit dans tous les genres de musique de chambre et d'orchestre, avec un beau corpus d'œuvres religieuses. Malgré sa réputation, seul un dixième environ de sa production pianistique est constitué d'ouvrages didactiques. Le recueil opus 300 (L'art de préluder, 120 préludes pour piano), constitue un témoignage éblouissant de la créativité, de l'art de l'improvisation, et de l'humour du compositeur. Czerny cisèle en quelques notes (7 secondes pour le n° 31 en ut majeur !) des aphorismes lapidaires, la plupart sur des tempi vifs, marquant une pause dans cette course effrénée avec le n° 59 (16 Modulations d'ut majeur vers tous les tons majeurs), très nettement plus copieux. Les tempi s'assagissent (et les morceaux s'allongent) à partir du n° 90, et on voit apparaître des réminiscences des compositeurs chéris de l'auteur, Bach, Haydn, Mozart (avec une citation littérale de la Flûte Enchantée), mais aussi Schubert, Beethoven, Mendelssohn, Liszt, Lanner et Strauss père, dans des fantaisies, impromptus et autres nocturnes qui ne disent pas leur nom, dont les doigts du magicien Kolja Lessing font un kaléidoscope chatoyant aux couleurs sans cesse renouvelées. (Jean-Michel Babin-Goasdoué) In his Opus 300 Carl Czerny compiled a unique keyboard compendium of all the stylistic facets of European music from the Baroque until far into the Romantic era – an audio history of music en miniature featuring preludes as our guides and an overwhelming variety of characters, forms, and pianistic invention. The 120 finely chiseled preludes range from the aphoristic extreme of ten to twenty seconds in length to the just as aphoristically packed narrative and rhapsodic forms of a maximum of three to four minutes. Their numerical midpoint is formed by sixteen very short interludes that are brilliant examples of modulations, each proceeding from C major to all the other major keys. Like most of the preludes from No. 60 to No. 71, they represent variants of this art form originally distinguished by improvisation: as interludes they build audio bridges from one (imaginary) work to the next and link what would appear to be beyond linking. The work of course is interpreted in its entirety on two CDs – by none other than Kolja Lessing, one of the most versatile musicians of our times and a violinist and pianist who combines interpretive and musicological work in his many significant contributions to music culture.
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