 L’idée de composer un Requiem – genre proscrit en Union soviétique – tenta longtemps Alfred Schnittke. Finalement il l’écrivit dans la foulée de la musique de scène commandée pour le Don Carlos de Schiller monté au Théâtre de Moscou, dont l’action se déroulait dans une église catholique selon les vœux du metteur en scène. Quatorze numéros pour une partition d’une quarantaine de minutes où se mêlent chant grégorien, liturgies orthodoxes ou romaines, avec l’évidente influence des grands ouvrages du protestantisme allemand, "Deutsche Requiem" de Brahms en tête. Mais Schnittke, si couramment versé dans le polystylisme va ici plus loin, convoquant un petit orchestre rock dont les sonorités à peines épicées se fondent dans les scansions latines, sans jamais nuire à la clarté du texte, à la transparence des textures, comme si Schnittke à la fois épurait son art et se délestait des folies de sa jeunesse, répondant par un certain classicisme à l’atelier ouvert que montrait alors Silvestrov dans ses œuvres. L’interprétation de cette partition fascinante, Requiem qui renonce à l’apaisement du Lux aeternam, laissant l’auditeur dans le sombre absolu d’une Union Soviétique carcérale, est de bout en bout splendide d’engagement et de poésie. L’ajout en postule des trois panneaux dorés que sont les Hymnes Sacrés apaisent la terrible amertume de cette prière des morts enténébrée (Discophilia - Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé)  Le Requiem d'Alfred Schnittke (1934-1998) composé juste après son Quintette pour piano dédié à sa mère (1972-76), résulte d'une commande pour la pièce de Schiller Don Carlos donné alors au théâtre de Moscou. Schnittke transforme ensuite la partition en Messe catholique pour les morts en en modifiant certains passages, omettant le "Libera me Domine" et faisant intervenir le "Requiem aeternam" inaugural au début et à la fin au lieu du "Lux Aeternum". Le compositeur emprunte largement à l'ancienne tradition chorale russe en l'intégrant dans un langage contemporain essentiellement tonal. L’œuvre comprend quatorze mouvements et exige un chœur, cinq solistes, et un ensemble instrumental réduit à un piano, un orgue, des guitares électriques, des cuivres et de nombreuses percussions. Elle reprend aussi en divers endroits le matériau du Quintette. Les "Trois Hymnes Sacrés" (1983) réfèrent explicitement à la grande tradition musicale orthodoxe et témoignent par leur densité de l'attachement du compositeur à une spiritualité plus profonde, à la fois intime et incarnée. Un recueillement et une émotion sincères se dégagent de cette version cent pour cent polonaise. Texture orchestrale cristalline, chaque instrument (Les trompettes, l'orgue, les percussions) jouant un rôle dramaturgique aussi important que les cinq voix tour à tour implorantes ou déclamatoires, le chœur intervenant comme coryphée. (Jérôme Angouillant)  The tradition of composing a funeral mass goes back to the times of the Late Middle Ages, yet its artistic excellence was reached by later generations of composers. At the beginning, Alfred Schnittke wanted to write a small instrumental Requiem, which was supposed to be one of the movements of the Piano Quintet. However, he eventually rejected the idea and composed a 14-movement Requiem. The piece is very expressive, plenty of dramatic contrasts. The instrumental parts of electric guitars or a percussion set referring to polystylistic interests of the composer constitute a surprising element. In turn, Three Religious Songs composed in the same style refer to the Orthodox music, introducing the atmosphere of contemplative reflection and prayer pensiveness.
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