Le vaste cycle symphonique composé entre 1997 et 2005 d’après "La Divine Comédie" de Dante aura été l’opus majeur de la maturité de Boris Tichtchenko et constitue probablement la meilleure porte d’entrée pour aborder son œuvre en même temps que son testament spirituel. Véritable musique de l’œil, qui suit par l’illustration sonore très exactement le texte de Dante, elle impose sa langue aventureuse avec une autorité fascinante. Tichtchenko y raisonne son orchestre, le débarrasse de l’écriture radicale qu’il emploiera dans ses symphonies pour mieux en faire un outil descriptif. La Troisième est absolument géniale, description méticuleuse des Cercles de l’Enfer où l’art inouï des timbres, qui fut toujours la signature de son art, résonne à plein. Quelle folie cette musique ! Une fois entendue on ne peut s’en déprendre comme on ne peut oublier les toiles de Jérôme Bosch : quarante minutes soufflantes où s’instille tout un univers venu de Gustav Mahler. Le "Paradis" (la Cinquième symphonie du cycle) est autrement déconcertant, musique fluide qui se teinte d’épisodes étranges, de menuets sarcastiques qui citent Chostakovitch, comme si la grande affaire du compositeur était d’abord, comme pour Dante, cet "Inferno" insensé, génialement brossé à fresque. Interprétation parfaite par les créateurs captés en concert (Discophilia - Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé) Le cycle symphonique "Béatrice" comprend cinq œuvres pour grand orchestre illustrant la Divine comédie de Dante. Les n° 3 et 5 ici captées live en 2009 sont deux immenses blocs sonores de plus d'une demi-heure concentrés sur les trois derniers cycles de l'Enfer et sur le Paradis. L'idéal, tant la musique est riche et l'orchestre impressionnant, serait, après avoir lu le texte, de suivre la partition en parallèle, tant les idées fourmillent dans un genre illustratif précis des différentes étapes où progressent les protagonistes. Un très bon livret (en anglais) écrit par le compositeur nous guide toutefois. Le style d'écriture très personnel de Tichtchenko mêle classicisme, modernisme, bruitisme, effets sonores en tout genre sur lesquels plane l'ombre de son maître Chostakovitch. L'interprétation, à défauts de référents multiples, possède une direction et un souffle, à n'en pas douter. Un regret ? L'absence de plages pouvant nous guider dans ce labyrinthe. Et ne vous fiez pas aux timides applaudissements de la fin, l’œuvre est magistrale ! (Nicolas Mesnier-Nature)
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