 Singulière aventure sonore qui nous transporte vers une terra quasi incognita : la plupart des œuvres pour viole de gambe de ce CD débordent du cadre spatio-temporel dans lequel, selon la doxa, l'instrument fut pratiqué. Avant même la fin du baroque il était dit-on, déjà supplanté par le violoncelle. Pourtant, nous sommes bien, ici, pour l'essentiel, en présence d'œuvres classiques ! Soit mais... en 1785, arrive à la cour ducale de Mecklembourg un certain F.X. Hammer, virtuose du violoncelle et de la viole qui s'emploie à produire des pièces autographes destinées à l'orchestre du palais local, et à copier, adapter ou arranger des œuvres de compositeurs (Fiala, A.Lidl, C. Stamitz...) dont il a fait la connaissance lorsque entre 1771 et 1778, il était violoncelliste à la cour des Esterhazy dont le maître de chapelle — Haydn— le tenait en haute estime. La production autographe de Hammer (dédiée pour une bonne part à la viole de gambe) est ensuite rassemblée à la bibliothèque de Schwerin. Déterminer ce que, dans cette collection, Hammer a composé lui-même ou ce à quoi il a contribué à titre de "truchement", est parfois malaisé. A-t-il, par exemple, dans le quatuor 5245, confié à la viole de gambe la partie que Stamitz avait dévolue à un autre instrument ? Ce quatuor n'a -t-il pas plutôt été spécialement écrit de bout en bout par Stamitz pour ou à la demande de Hammer ? Quoi qu'il en soit, on tient là l'œuvre la plus saisissante de l'album, unique en son genre dans la collection et dans toute la littérature pour viole de gambe. L'interprétation, superbe, montre combien la saveur, la suavité du timbre de l'instrument s'allient avec aisance, naturel, et subtilité, aux inflexions du quatuor classique. Les pièces délicates de moindre envergure sont rendues avec clarté, précision et finesse (sonate 2285:3 de Hammer, sonate «de» ou «attribuée à » Lidl). Celle de Fiala manque en revanche de relief et paraît atone. Il est heureux que parmi ces pièces de la collection Hammer viennent s'insérer des pages qui lui sont étrangères, la mettant de la sorte en perspective et lui faisant contraste : 2 courts solos du grand Carl Friedrich Abel, intenses, pleins d'élan, exploitant les capacités tant techniques que mélodiques de l'instrument. Et une magistrale sonate en Ut majeur de C.P.E. Bach où dans la partie de viole, nerveuse, abrupte, mordante, se condense la chaleur et l'énergie du "Sturm und Drang". (Bertrand Abraham)  A genuine viola da gamba repertoire in "Viennese Classic"? From 1785, Franz Xaver Hammer worked as a viola da gamba and cello virtuoso at the court of Mecklenburg-Schwerin, which resided in the idyllic baroque palace of Ludwigslust. Thanks to his surviving scores, we are in possession of a unique classical viola da gamba repertoire in the truest sense of the word. Some of these works were composed by himself, and on the other hand, he copied and possibly also arranged works by highly regarded colleagues, including Andreas Lidl, Joseph Fiala and Carl Stamitz. This precious collec??on, carefully curated by gamba virtuoso Juliane Laake, forms the founda??on of this recording. The splendid interpreta??ons with the Ensemble Art d'Echo show how naturally the viola da gamba fits into the instrumentarium and style of the classical era.
|