Le Quatuor Amadeus joue Schubert Mozart et Haydn - DIAP104 - Petits prix - par Diapason

« Si la personnalité humaine est une énigme, la réunion de quatre individus reste, elle aussi, un mystère. Pour rendre perceptible aux générations futures l’essence de la musique, il faudra prendre conscience que l’art, demain, ne nécessitera pas tant de perfection que d’humanité. S’il y a un message du Quatuor Amadeus c’est bien celui-là. L’autre secret des Amadeus c’était l’intuition, la spontanéité. [...] Ils avaient sublimé ce sens de l’humain que nous percevons si rarement ». C’est ainsi qu’Hatto Beyerle, altiste fondateur du Quatuor Alban Berg, rendait hommage à ses grands aînés en octobre 1987, quelques semaines après la disparition brutale de l’altiste Peter Schidlof. Celle-ci mettait un terme à quatre décennies d’une carrière scellée par la promesse de ne jamais remplacer un des leurs. Voilà aujourd’hui plus de trente ans que le Quatuor Amadeus s’est définitivement tu, trente ans au cours desquels on a pu mesurer à quel point leur art avait influencé les générations suivantes dans l’approche des classiques viennois. Quitte à choisir quelques gravures « indispensables » au sein de leur discographie, nous avons décidé de réunir ici des perles de jeunesse issues de bandes radio récemment découvertes. En restant centrés sur leur répertoire de prédilection, tout en évitant les chevaux de bataille cent fois réédités, nous avons opté pour deux partitions particulièrement chères à leur coeur (Schubert, Mozart) mais aussi pour une page absente de leur discographie commerciale (Haydn). Longtemps considéré comme une oeuvre de maturité, le Quatuor en mi bémol de Schubert jaillit en fait de la plume d’un garçon de seize ans. Les Amadeus y reviendront durant toute leur carrière. On retrouve l’élégance princière de cet enregistrement de novembre 1951, doublée d’un sens profond du drame, dans leur interprétation du Quintette en ut majeur de Mozart au côté de leur partenaire de toujours, l’altiste Cecil Aronowitz. Sans jamais forcer la structure de l’oeuvre, les jeunes Amadeus (ici à la Radio de Cologne en 1953) en traduisent les émois, les élans et les moments déchirants avec un raffinement exquis. L’Opus 20 fait partie des cycles haydniens qui manquent cruellement à leur discographie. Ce quatuor en fa mineur avec sa fugue finale a due soggetti (RIAS, mai 1952) démontre l’intensité de leur dialogue interne, typique de leurs témoignages de jeunesse, autant que leur goût prononcé à révéler l’audace de l’écriture. En guise de bis, leur seule et trop brève incursion officielle dans l’univers mendelssohnien avec ces Caprice et fugue de l’Opus 81 est un pur miracle. (Jean-Michel Molkhou)