Peu à peu, l’œuvre de Juon sort du purgatoire où elle était jusqu’à présent reléguée. Nul doute que ce bel album est appelé à jouer un rôle essentiel dans cette redécouverte. L’ensemble des quatre quatuors du compositeur russe tient en effet une place majeure dans son catalogue. Les trois premiers, antérieurs à la première guerre, témoignent d’une grande imagination et d’un goût souvent prononcé pour des timbres savoureusement rustiques. Ils n’en sont pas moins ambitieux, surtout l’opus 5 et ses cinq vastes mouvements. Plus âpre, le dernier, écrit en 1920, s’approche de Janacek voire de Bartok. On ne peut que saluer la maîtrise technique et surtout stylistique des Sarastro, qui éclairent tour à tour les divers aspects de l’œuvre de Juon. Accents faussement populaires, sophistication de l’écriture, richesse de l’inspiration mélodique, toutes ces composantes viennent parfaire le portrait du musicien. Plus que ses partitions symphoniques assez conventionnelles, ces pages restituent la vraie grandeur du compositeur souvent abusivement qualifié de Brahms russe, étiquette facile mais bien réductrice. (Richard Wander) "The missing link between Tchaikovsky and Stravinsky" – this is how a contemporary critic once termed the late romantic composer Paul Juon, who was born to Swiss parents in Moscow, graduated from the conservatory with flying colors, and then went to Berlin in 1894 to study with Clara Schumann’s half brother Woldemar Bargiel. In 1907 the very discriminating Joseph Joachim appointed him to a full professorship at the Berlin College of Music. Juon penned orchestral compositions and piano and vocal music, but chamber music was his domain. Following the release of his Piano Quartets (cpo 777 278-2/8752491) and his Quintet and Sextet (cpo 777 948-2/6959757), likewise with piano music, it is now time to present his String Quartets. Once again all the essential traits of Juon’s compositional style are brought together with the finest craftsmanship: his predilection for irregular rhythms and rhythmic-metrical peculiarities, bold harmonies, and an unmistakable Russian folk tone in the melodic sphere. Since Juon anticipated developments for which Stravinsky, Blacher, and Messiaen later became famous, we might well consider including him among the important rhythmic innovators. In his chamber music Paul Juon is in a class all by himself.
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