 Paris 1804. Napoléon s’auto-couronne Empereur des Français, et Cherubini met le point final à la partition de ses « Deux Sonates ou études pour le Cor avec accompagnements » (de quatuor à cordes). Né à Florence en 1760, arrivé à Paris en 1786, il devient inspecteur au Conservatoire dès sa création en 1795, il en deviendra Directeur en 1822, jusqu’à sa mort vingt ans plus tard. En 1804 existent deux classes de cor au Conservatoire, animées par Domnich (cor grave) et Duvernoy (cor mixte). On ignore pour quel interprète ont été conçues ces deux pièces, qui sont peut-être destinées à l’enseignement. Né à Prague en 1770, Anton Reicha est arrivé à Paris lui aussi, en 1799. Il sera nommé professeur de fugue au Conservatoire en 1818, puis professeur de contrepoint et fugue. Compositeur de grand talent lui aussi, il a entrepris entre 1815 et 1819 la composition de 24 quintettes à vent dont il confie l’exécution à des collègues et amis, Guillou (flûte), Vogt (hautbois), Dauprat (cor), Boufil (clarinette), et Henry (basson). Plein de gratitude pour l’exécution brillante et soignée de ses quintettes par ces virtuoses, il dédie à chacun un quintette avec accompagnement de quatuor à cordes. Celui destiné à Dauprat (Opus 106 en Mi majeur) voit le jour en 1828. Ce dernier l’a conseillé pour la composition de l’œuvre. Après avoir été l’élève de Reicha, entre 1811 et 1814, il est devenu son ami et l’a incité à composer pour le cor, outre ce quintette et la série de 24 œuvres susmentionnée, un nombre important d’œuvres utilisant un ou plusieurs cors. Répétiteur d’une classe de solfège dès 1802, il devient professeur assistant en 1816 puis professeur à part entière en 1818 au Conservatoire, jusqu’en 1842. Excellent compositeur et virtuose accompli, il composera de nombreuses œuvres pour son instrument, dont une série de 3 quintettes Opus 6 dont celui en mi bémol majeur est le dernier. Œuvre ambitieuse qui exige un interprète chevronné, elle est, comme toutes les pièces enregistrées ici, destinée au cor naturel, qui gardera la faveur des cornistes et compositeurs jusqu’à la fin du siècle, malgré l’invention des pistons dès 1818. Instrumentant sa Pavane pour une Infante Défunte en 1910, Ravel exigeait encore 2 cors naturels en sol. Le jeune soliste de cet enregistrement, Alessandro Denabian, magnifiquement soutenu par les instruments d’époque du Quatuor Delfico, signe ici une performance exceptionnelle. (Jean-Michel Babin-Goasdoué)

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