 Voilà sans aucun doute un disque étonnant, et détonnant par son programme, mais qui montre exemplairement l’excellente santé de cette école de violonistes tchèques qu’ont illustrée depuis le XIXe siècle Wranizki, Ondrícek, Kubelik, Kocian, Príhoda, Novák, Suk, Messiereur, Sporcl et aujourd’hui Josef Špacek, accompagné du violoncelle de Tomáš Jamnik. L’arrangement pour ces deux instruments du premier Quatuor de Janácek, signé par Jirí Kabát (2021), est une première surprise qui met particulièrement en valeur le principe compositionnel par petites cellules rythmiques cher au compositeur, et permet d’apprécier la puissance expressive des sextolets si remarquables de l’introduction Adagio. Les deux œuvres suivantes constituent une sorte d’hommage à deux compositeurs précocement fauchés dans les camps de concentration de la Seconde guerre mondiale. Le Duo en quatre mouvements d’Erwin Schulhoff (1925) recourt de manière insolite et intrigante au con sordino dans l’Andantino de son troisième mouvement tandis le second, Zingaresca, brille de tous les feux d’une éclatante virtuosité. Le Duo en deux mouvements de Gideon Klein (1941), travaillant de manière moderne des motifs populaires, pousse à ses limites l’instabilité tonale déjà perceptible chez Janácek, et laisse en suspens un Lento que le compositeur n’eut ni le temps ni les forces d’achever. Les interprètes, ne cherchant pas à compléter cette pièce, observent en place un silence de vingt-cinq secondes, chacune représentant une année de la vie de Klein. Inutile de présenter désormais Bohuslav Martinu. Ses deux Duos, respectivement de 1927 et 1958, encadrent la période la plus productive de son art. Le premier témoigne dans l’Andante moderato initial de son intérêt pour l’impressionnisme Tandis que le second, de forme nettement néoclassique, se distingue par ses surprenants accents jazzy. Violoniste et violoncelliste, tout au long de ce programme original, se montrent au-dessus de tous éloges et signent là un enregistrement en tout point remarquable. (Jacques-Philippe Saint-Gerand) Paths – crossing and diverging, those we choose ourselves and those that are predestined and inevitable: through this prism the violinist Josef Špacek and the cellist Tomáš Jamník view the music of four Czech composers written within a mere 35 years of the 20th century. Janácek, enraptured by the idea of Pan- Slavism, was led by desire to Russia, a country where he found inspiration for his string quartet (here in an ambitious arrangement for two instruments), in a novella by Tolstoy. Ervín Schulhoff, an admirer and friend of Janácek’s (to whom he dedicated the duo featured on the present album), invested his hopes in Soviet Russia, yet this did not save him from death in a Nazi concentration camp. A similar fate (incarceration in Theresienstadt and Fürstengrube) befell Gideon Klein, another gifted and promising composer, who was murdered by the Nazis at the age of 25. Just two incomplete movements of his remarkable Duo for Violin and Cello have survived. The paths pursued by Bohuslav Martinu – first driven by thirst for knowledge and then forced to flee the Nazis – led from Prague through Paris to the USA, before returning to Europe; yet circumstances did not allow him to see his beloved country again. Martinu wrote his Duo for Violin and Cello No. 2 towards the very end of his life – and it also concludes the album by two brilliant artists. A virtuoso, profound and forcible recording indeed.
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