Le concerto pour piano de Lou Harrison, écrit pour Keith Jarrett en 1985, sur un piano accordé comme au temps de Bach !  Peut-on vraiment écouter un concerto moderne où le piano est « mal-tempéré », les sections orchestrales accordées différemment, où les touches noires sont accordées mathématiquement et les blanches selon l’intonation « juste » de la Renaissance et du Baroque ? La réponse : un « oui » catégorique ! La musique de Harrison a subi beaucoup d’influences surtout du sud-est asiatique sans toutefois abandonner totalement les traditions occidentales. Le résultat est un savant brassage de styles, d’instruments inattendus, de sons exotiques – une richesse harmonique et une certaine beauté mystérieuse. Le premier mouvement est de construction classique aux nuances orientales ; le deuxième, Stampede (débandade) – un scherzo-moto perpetuo – est suivi d’une longue et belle méditation, et d’un final évoquant Bartok ou Tcherepnin. Ecrite en 1951, la Suite pour violon et piano, et petit orchestre dont l’instrumentation est pour le moins original (2 flûtes, hautbois, harpe, célesta, tackpiano – un piano dont les touches sont « équipées » de pointes pour parodier le clavecin –, tam-tam, 2 violoncelles et contrebasse) est une sorte de concert brandebourgeois moderne où chaque groupe d’instruments a son « moment ». A consommer sans modération ! (Alan McKay)  Lou Harrison aime bien se rappeler les jours où, encore étudiant, il allait dans le quartier de Chinatown, accompagné par son ami John Cage. Après avoir dîné, ils allaient à l'opéra cantonais où ils restaient parfois jusqu'à 1 heures du matin. "Du temps où j'étais un adulte, j'avais écouté plus d'opéra chinois que de variété européenne", nous confie Harrison. Ainsi que Cage, Harrison a construit pratiquement tout son œuvre sur ses premiers contacts avec la musique non-européenne. Le concerto pour piano qu'il a écrit en 1985 spécialement pour Keith Jarrett, ne fait pas exception de la règle. Une œuvre de grande envergure composée de 4 mouvements, ce concerto emploie un piano accordé comme au temps de Bach. C'est-à-dire que les touches noires sont accordées afin de produire des quartes et des quintes parfaites et les touches blanches afin de produire "l'intonation juste" de l'époque baroque. Un concentré de Lou Harrison, ce concerto synthétise en quelque sort l'essence de toute la musique du compositeur. Un must !

|