 Cet album défend une thèse : Que la violence accompagne souvent Eros, voire qu'ils sont liés. La partie centrale en est constituée par les « Chants pour 7 voix de femmes avec instruments de percussion » de Claude Vivier. Ce compositeur québécois, né à Montréal en 1948, est mort à Paris en 1983, assassiné, sans doute par un jeune prostitué gay qu'il avait rencontré quelques semaines auparavant. Né de parents inconnus, confié à des familles d'accueil où il est violenté et abusé, il est confié à 13 ans aux Frères maristes, chez qui il s'initie à la musique. Il complètera sa formation musicale auprès de Gilles Tremblay, disciple québécois de Messiaen, puis auprès de Stockhausen, et s'intéresse à la musique spectrale avec Gérard Grisey, et Tristan Murail. Il trace ensuite sa propre voie musicale. Le texte des « Chants » est un mélange de français, d'allemand, de latin, et d'une langue imaginaire faite d'onomatopées. L'obsession de la mort, l'aspiration à une régression « in utero » et un mysticisme catholique marial y sont omniprésents. L'écriture musicale abonde en dissonances expressives, en ruptures de rythme, en glissandos, cris et jappements. Il en émane une impression de chaos primordial, dans une ambiance sépulcrale. On admire la performance vocale des interprètes. En ouverture de cet album, on trouve des madrigaux à cinq voix extraits des livres V et VI de Gesualdo, et des livres I et II d'un de ses disciples indirects, le violoniste Michelangelo Rossi (Gênes, 1601-Rome, 1656). On sait la prégnance de l'association entre érotisme et violence dans l'œuvre tardive de Gesualdo, on connaît moins l'œuvre vocale de M. Rossi, qui lui doit beaucoup. L'étrangeté, le maniérisme, les dissonances et chromatismes de leurs œuvres sont fort bien portés (Peut-être trop ? Fallait-il surenchérir ?) par les interprètes (la Schola Heidelberg dirigée par Walter Nussbaum). La musique n'est-elle pas assez éloquente ? Les textes des madrigaux sont lus par un acteur. Et pour compléter la démonstration, le livret nous offre un texte d'une éminente neurobiologiste qui explique en gros que la passion érotique peut inhiber le jugement moral et favoriser le passage à l'acte violent. On peut être intéressé par les neurosciences et douter de leur capacité à éclairer la création artistique. (Marc Galand)  The Schola Heidelberg covers a wide range of musical styles in its new GENUIN CD with works from the Renaissance and today. Under the title "Eros und Gewalt" (Eros and Violence), the virtuoso vocal ensemble juxtaposes works by Gesualdo di Venosa and Michelangelo Rossi with those by Claude Vivier. Neurobiologist Hannah Monyer explains the psychological background of the emotionally charged music, in which Italy from around 1600 and our time find themselves very close to each other. The Schola Heidelberg sings under the direction of its founder Walter Nußbaum. It is one of the leading European vocal ensembles, mastering a wide variety of styles and vocal techniques, including microtonal intonation and vocal and breathing sounds.
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