 1682, Georg Muffat met a tempo le point final à son Armonico Tributo pour les célébrations du 1100e anniversaire de la fondation de la ville. Cinq Sonates qui sont de fait des suites réunissant les gouts français et italiens, merveilles alliant le savant et la danse, teintant le profane d’une touche de sacré. L’œuvre est restée au panthéon de la musique instrumentale du 17e Siècle, modèle d’équilibre qui demande aux interprètes de l’intériorité, du recueillement et de la poésie. Lars Ulrik Mortensen les anime de son clavecin et les fait sonner en grand apparat, vingt deux musiciens, un orchestre bien plus vaste que celui formé par Gunar Letzbor dans sa récente version (2019), ce qui donne à l’ensemble des Sonates une dimension quasi romantique, en avive aussi les contrastes ; tout ce qui ressort de la danse sonne ici avec un éloquence surprenante que des lectures plus chambristes ne divulguaient pas. Version singulière d’un chef d’œuvre encore trop peu enregistré. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)  On doit beaucoup à Muffat, malgré une œuvre restreinte en quantité : ses écrits (dont l’introduction à cet Armonico Tributo) ont grandement éclairé les pionniers du renouveau baroque en matière de pratique instrumentale. Mais il ne faudrait pas oublier l’originalité de sa production, dont on peut juger ici. Réalisant une sorte de synthèse entre le style de Corelli (dans les mouvements lents), celui de Lully (dans les danses à la française) mais aussi de Biber, il propose avec l’Armonico Tributo un objet vraiment particulier. Harmonie complexe, usage étonnant des silences, et surtout « géométrie variable » : les œuvres peuvent être jouées à trois (un par partie), à cinq (avec deux violons et deux altos) ou comme des concerti grossi avec tout un orchestre divisé et incluant des vents. On ne manque pas d’enregistrements, et en général ils proposent l’ensemble du recueil sous une des trois formes. Mortensen et ses collègues danois ont choisi pour chacune des cinq sonates l’effectif qu’ils jugent le plus adapté, ce qui donne un bel aperçu général du concept. Autre différence de taille : ils évitent la caricature qu’on entend souvent ailleurs sous prétexte que Muffat s’était emballé en Italie pour la succession de pianissimi inaudibles et de tutti tonitruants. Si pour ma part je préfère globalement l’agilité de la vision de Gunar Letzbor avec Ars Antiqua Austria, je trouve que le rendu en concerto des sonates I, II et V est plus équilibré et naturel ici que chez Chiara Banchini et son Ensemble 415, malgré une prise de son assez compacte. (Olivier Eterradossi)

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