Anton Bruckner (1824-1896)
Symphonie n° 4 en mi bémol majeur, WAB 104 "Romantique"
Symphonie n° 9 en ré mineur, WAB 109

Wiener Philharmoniker
Christian Thielemann, direction

L’intégrale des onze Symphonies, puisqu’aussi bien Christian Thielemann ajoute à Vienne les deux « Nulte » qu’il n’avait pas enregistrées avec Dresde, Munich ou Berlin, fera bientôt l’objet d’un coffret récapitulatif en édition Blu-ray, alors que Sony réunira également les captations audio-phoniques enregistrées durant ce même cycle mais à des dates, et parfois en des lieux différents, j’y reviendrai. Avantage aux captations d’Unitel : voir la battue économe de Christian Thielemann, saisir ce mélange de concentration et de fluidité qui comprend l’agogique brucknérien jusque dans ses rubatos infimes dont le mouvement découle – Jochum faisait ainsi, pas Günter Wand - serait déjà suffisant, mais la qualité des prises de son des ingénieurs de l’ORF est l’autre atout majeur. Sommet de cette ultime livraison, les deux captations au Festival de Salzbourg où les Viennois emplissent le grand vaisseau du Festpielhaus de leurs timbres de soie, magiques dans une Romantique de pur onirisme où Thielemann déploie une narration pastorale d’une folle beauté, au point parfois d’encourager chez ses musiciens et chez lui-même un certain narcissisme. Tous s’écoutent, mais comment leur en vouloir tant ce qu’ils offrent fait l’effet d’un philtre ? Autrement vertigineuse dès son prélude de ténèbres, la 9e sera un voyage vers une abstraction sonore : l’Adagio inachevé est simplement cosmique après l’exaltation mystique du Feierlich et l’abrasion du Scherzo. La porte vers un autre monde dont les ultimes mesures me laissent à penser que Thielemann serait chez lui dans une autre Neuvième, celle de Gustav Mahler évidemment, un compositeur qu’il a abordé avec bien des précautions jusqu’ici. Compléments à ne pas négliger après chaque symphonie, les « Discovering Bruckner » : voir Thielemann diriger est une chose, l’entendre sur Bruckner en conversation avec Johannes-Leopold Mayer donnera quelques clefs supplémentaires. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)

Ce double album qui achève la magnifique intégrale des onze symphonies de Bruckner par Christian Thielemann et les Wiener philharmoniker laisse une impression plus mitigée que les précédents. Car la « Romantique » captée en 2020 au Festspielhaus de Salzbourg est une pure splendeur qui approche la célèbre référence historique de Karl Böhm avec ces mêmes viennois. Et le passionnant entretien du maestro avec Johannes-Leopold Mayer montre sa compréhension profonde du texte y compris dans ses différentes variantes qu’il semble avoir toutes étudiées soigneusement et connaître sur le bout des doigts. Mais c’est la 9°, enregistrée elle aussi en concert à Salzbourg en 2022, qui déconcerte davantage. Outre l’entretien avec l’ineffable Mayer qui montre que ni le chef ni son interlocuteur n’attachent la moindre valeur au travail acharné de Bruckner sur le finale, ce qui est désolant, la conception même du chef d’une œuvre profane et d’une certaine façon plutôt lumineuse surprend, comme si, à force de nier la dimension mystique de la symphonie, Thielemann était passé à côté de sa signification profonde. Dommage. (Richard Wander)

On the occasion of the Bruckner bicentenary, the Wiener Philharmoniker recorded its first ever complete Bruckner cycle under the baton of Christian Thielemann. In addition to the well-known canon of nine symphonies, the two earliest Bruckner symphonies in F minor and D minor, which are a world premiere on DVD and Blu-ray, were also recorded for the first time in the orchestra's history. This uniquely complete edition from the Musikverein and Salzburg Festival, featuring 11symphonies, also includes extensive conversations with Christian Thielemann about each symphony and insights into his rehearsal work.